Interview : Cocoon

En six ans, Cocoon a réussi à s’installer confortablement sur la scène pop française. Considérés comme pionniers du renouveau folk en France, ses membres font partie de ces artistes qui ont décidé de chanter exclusivement en anglais, quitte parfois à encaisser de violentes critiques. De passage aux Francofolies de La Rochelle, le duo parle de son parcours, sans langue de bois.

 Propos recueillis par Sabine Bouchoul

 L’anglais n’est plus un handicap désormais ?

Mark : On a été parmi les premiers à chanter en anglais. On est content de faire partie de cette vague-là. Il y a six ans c’était un peu mal vu, et là, les esprits commencent un peu à changer. Et heureusement d’ailleurs. Aujourd’hui c’est complètement assumé. Aux Francos, ils avaient prévus une affiche avec que des groupes qui chantent en anglais sur la Grande Scène, le jour de la Fête Nationale ! Grosse revanche donc. Et puis, ce qui est bien avec cette nouvelle scène, c’est que ça marche bien pour tout le monde. C’est pas du tout une mode qui s’est effacée après un album, on sent qu’il y a des groupes qui commencent à s’installer dans le paysage, sans que ça dérange qui que ce soit. Et puis nous, on est hypercontents, on a eu un disque de platine avec le premier album, pareil pour le deuxième, et si ça continue, ce serait super.

 Ça donne quoi, Cocoon, sur scène ?

Morgane : De la m*rde ! Comme d’habitude, ça va être nul ! On est neuf sur scène, dont trois cordes, deux cuivres et nous !

Mark : Au début, pour la scénographie, on voulait apporter une énorme baleine gonflable. Celle qu’on voit dans Comets et qu’on reverra d’ailleurs dans le clip de Dee Doo. Mais en fait, c’est galère de ramener un gonfleur, et de gonfler une baleine tous les soirs.

 Vous avez enchaîné les festivals cet été ?

Mark : On était à Fourvière, c’est sublime, ça se passe dans des arènes. On a fait Musilac, on jouait juste avant Ben Harper, c’est cool parce que c’est quelqu’un que j’écoutais beaucoup quand j’étais adolescent. Et puis, on a beaucoup tourné à l’étranger, et du coup Morgane est devenue bilingue assez vite ! Alors qu’au début de l’aventure elle parlait beaucoup moins bien que les musiciens du groupe, aujourd’hui, elle parle mieux que toi et moi réunis. Elle parle aux chauffeurs de taxi new-yorkais, elle se met à côté d’eux, et elle n’arrête pas de les saouler ! (rires)

 Et à New York, justement, quel a été l’accueil du public ?

Mark : Super bien ! Mais le public est divisé. Il y a beaucoup de Français qui sont des expat’, l’autre partie est constituée de natifs. Là-bas, on est perçu comme trendy, on est plutôt à la mode. Ce sont plutôt des gens de Williamsburg – des gens branchés, de culture un peu alternative -, qui nous écoutent, et qui nous trouvent indie, un peu comme pour Phoenix. Je crois que c’est très fashion d’être français à l’étranger. Alors qu’ici, au début, on nous a pris la tête parce qu’on chantait en anglais en France, là-bas, au contraire, on nous dit : « continuez ! ».

Morgane : C’est assez paradoxal, parce que d’un côté tu te sens rejeté par ton pays, alors qu’à l’étranger tu es super bien accueilli.

 Question de culture sans doute ?

Mark : C’est étrange, parce qu’en Belgique, à deux cents kilomètres, il y a une vraie culture anglo-saxonne, mais qui date d’il y a presque trente ans, avec des groupes comme dEUS, Venus, Girls in Hawaii ou Ghinzu… Et nous, on n’a pas eu ça.

Morgane : Pour eux, c’est une évidence. Et quand on va en Belgique, on ne nous demande jamais pourquoi on chante en anglais ! Et puis, ce n’est pas non plus un prétexte de facilités.

Mark : D’ailleurs c’est une question qui m’insupporte, moi je m’en vais maintenant quand on me la pose ! On ne demande pas à un Français pourquoi il chante en français. C’est, pour nous, un instrument comme un autre.

 Propos recueillis par Sabine Bouchoul pour le magazine Made In Riviera