Barbie Superstar aux Arts décoratifs

Le Musée des Arts décoratifs consacre une large exposition à Barbie.  Jusqu’au 18 septembre, les visiteurs découvrent les mille et une vies de la plus célèbre des poupées dans une scénographie acidulée.


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Lorsqu’elle est arrivée au pied du sapin, le soir de mon sixième Noël, elle avait déjà vécu mille vies. Elle avait appartenu à des millions de petites filles, on dit même qu’il s’en vendait une toutes les trois secondes sur la planète. En 1992, nous sommes presque des milliards à la posséder. Je l’avais vue dans les mains de toutes mes copines de l’école. Mais avant le cours préparatoire, je n’en avais jamais possédée, je préférais jouer avec les petites voitures de mes copains. Pour mes parents, j’étais un véritable garçon manqué.

Mais, Barbie n’était pas comme les autres poupées et elle a exercé son terrible pouvoir de séduction sur moi, comme elle l’avait fait sur toutes les petites filles. Le soir de Noël, en un regard, elle m’avait eue. Elle n’était rien qu’à moi. Belle, blonde, et radieuse dans sa très longue robe rose et blanche, toute en froufrou et fanfreluche. Elle devint l’aînée d’une collection qui allait compter plus de quarante modèles quelques années après. Elle s’appelait Barbie, “princesse conte de fées”.

Passion

C’est vrai que sa vie ressemble à celle d’un conte de fée. Pourtant tout n’a pas été rose pour elle. À sa naissance, aux États-Unis en 1959, elle en a suscité des passions, Barbie ! Une partie de l’Amérique puritaine ne voyait pas d’un très bon œil l’arrivée de cette bonne femme mannequin. À son arrivée en France, dix ans plus tard, la belle blonde se heurtait aux mêmes réactions : « Pas de poupée putain aux Galeries Lafayette ! » s’écriait-on à Paris. Il faut dire qu’elle a bouleversé bien des codes. Le poupon de chiffons devenait une poupée de plastique. La poupée asexuée possédait désormais des traits humains, féminins. Barbie, c’est une pin-up de 29 centimètres, des jambes interminables, une poitrine bombée, une taille fine, très fine, de longs cheveux blonds, de grands yeux bleus et des vêtements couture. Avec elle, les petites elles ne jouaient plus à la mère parfaite, elles apprenaient à être de futures Lolita, façon Nabokov. Grâce à Barbie, on se projetait déjà dans une vie d’adulte. En la regardant, on n’avait plus six ans, mais seize. Nos Barbies ne ressemblaient guère à celles de nos mères. Avec les années, Barbie a changé. Elle a traversé les décennies sans aucune égratignure.14101697_10154387607191866_488232208_n
Popstar

En cinquante ans, son visage s’est métamorphosé. Sept fois. Les Barbies de Maman avaient un teint de porcelaine et ne se maquillaient pas, les nôtres avaient la peau bronzée et une allure de surfeuse californienne. Les siennes étaient baby-sitters, hôtesses de l’air, mannequins, les nôtres rock stars, chirurgiens, astronautes. Elles montaient à cheval, conduisaient des jeeps, jouaient de la guitare. De génération en génération, le champ d’activité de Barbie s’est étoffé, tout comme sa garde-robe. Elle était toujours au top de la tendance. Les Barbies avaient leur propre armoire où l’on rangeait soigneusement leurs tenues par couleurs, les brosses à cheveux et les stilettos. Les plus grands couturiers – de Dior à Lagerfeld – se battent pour l’habiller. Barbie, la femme intemporelle a été le témoin de l’évolution de la femme et de son rôle dans notre société : adolescente modèle en 1960, hippie en 1970, femme d’affaires en 1980, cosmopolite en 1990, pop star en 2000. Barbie l’Américaine change d’allure et s’ouvre au monde. L’Occidentale devient Africaine, Asiatique, Latino-américaine, Indienne, Orientale. Plus qu’une poupée, elle est devenue au fil des années un objet de culte. Les collectionneurs se l’arrachent à prix d’or tandis que les féministes donneraient leur or et même plus pour arracher les petites filles de son emprise.

On lui reproche d’être femme-futile et femme fatale. Les médecins, quant à eux, l’accusent d’inciter les filles à la maigreur voire l’anorexie pour atteindre des mensurations impossibles. Aujourd’hui, les ventes de Barbie sont en chute libre. Sans doute parce qu’aujourd’hui que désormais il suffit d’allumer nos écrans de télévisions pour voir des poupées parler, chanter, jouer la comédie.

Barbie ne ferait-elle plus rêver ? Réponse au Musée des Arts décoratifs où une exposition lui est consacrée jusqu’au 18 septembre. Mise en scène grandiose, vêtements grandeur nature, tenues de créateurs, toutes les Barbies de nos vies sont là. On y apprend la vie et l’oeuvre de la demoiselle. Sa vie inventée, ses amies, ses petits-amis, son évolution et ses métiers. On la découvre sous différents visages : elle est Maryline Monroe, Katniss de Hunger Games, elle se transforme en personnage du Seigneur des Anneaux, de Grease, elle se fond dans la popculture et la popculture lui rend hommage également. Les photographes s’inspirent d’elle. Certains mettent en scène des tops sous ses trains pour un résultat plus que bluffant.

Et même si cela peut ressembler à une immense publicité à la gloire de la plus célèbres des poupées, on en ressort tout de même émerveillés.

BARBIE

En savoir plus :
Musée des Arts décoratifs
107, rue de Rivoli
75001 Paris

Tél. : +33 (0)1 44 55 57 50
Métro : Palais-Royal, Pyramides ou Tuileries
Autobus : 21, 27, 39, 48, 68, 69, 72, 81, 95
http://www.lesartsdecoratifs.fr
Tarifs : 13 euros