“22, A Million” de Bon Iver, l’album qui nous fâche avec les critiques

COUP DE GUEULE – Attention, billet d’humeur pour Bon Iver : 22, A Million, les critiques et nous.

J’aime Justin Vernon. Je l’aimerai toujours. Pour le Bon Iver d’avant. Pour “The Wolves”. Pour “Creature Fear”. Pour ses collaborations et ses idées de festival. Il y a quelques jours est sorti 22, A Million, le dernier album de Bon Iver en date. Je ne suis pas là pour faire une critique complète de cet album. Sache juste qu’avant sa sortie j’étais complètement open-minded. Bon Iver, Bon Iver ne m’avait jamais vraiment convaincue, alors ce groupe, j’avais eu le temps de ne plus rien en attendre.  J’étais prête à tout entendre.

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Tout peut-être, sauf ça. J’ai lutté à la 1ère écoute complète. Sévère. Tenir jusqu’à la fin sans interrompre le déroulé de l’album n’a été possible qu’en occupant une partie de mon cerveau à autre chose. Et ça, ce n’est jamais bon.

Quand Bon Iver soigne l’emballage mais oublie le cadeau

Qu’on soit clair, cet album n’est pas mauvais. 2-3 titres sont même plutôt cools. Je pense même que “22 (OVER S∞∞N)” est une chanson magnifique. Que “21 M♢♢N WATER” avait tout pour me séduire. Je peux aller jusqu’à écouter une ou deux chansons par-ci par-là et y prendre un vrai plaisir, si si (“29 #Strafford APTS”).

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Mais l’album tout entier ? Impossible. C’est une succession de voix de robots, de samples inintéressants, d’expérimentations électroniques. L’exemple parfait : “715 – CRΣΣKS”. Paroles pleines d’émotions pour un résultat qui en est totalement dénué. C’est le choix que Bon Iver a fait.

Bon Iver a créé un album concept à base de hiéroglyphes modernes, et de clips étranges, libre à la lecture. Version 2.0 du folk à l’ère du numérique, allégorie de la mutation de notre société, vois-y ce dont tu as envie.

Moi, j’y vois un album où le CONCEPT a prévalu sur le CONTENU. Et les albums comme ça, j’ai toujours trouvé ça chiant, excuse-moi le mot. J’en ai un peu voulu à Justin Vernon d’avoir sombré là-dedans. Et puis le 1er et 2 octobre, j’ai compris. Dans un évènement musical original (Michelberger Music) organisé par Justin Vernon lui-même (entre autres), j’ai eu la chance de voir et d’entendre 3 de ses facettes : seul avec son piano (à pleurer de beauté), avec son groupe et ses laptops (sans intérêt), et avec sa guitare en collaboration avec les frères Dessner de The National (épatant). J’y ai compris que ce garçon-là était prêt à tout pour tenter des choses, créer du neuf, tester, détruire, reconstruire, proposer. Sans arrêt. En ça, 22, A Million se comprend. Et en ça, je célèbre même sa sortie.

Un accueil incroyable, et peu croyable

Mais ce qui reste incompréhensible, c’est l’absence de diversité dans les critiques (je te laisse jeter un œil par-là, c’est ahurissant). À l’exception d’Olivier Lamm pour Libération, je n’ai vu que très peu de critiques négatives sur un album pourtant pas exceptionnel, ni par son contenu, ni par son originalité.

Alors quel intérêt à encenser soudainement et unanimement l’album moyen d’un artiste qu’à l’époque personne ne jugeait bon d’écouter ? Comment en sommes-nous arrivés à un monde où la diversité des opinions est effacée au profit de… ? Au profit de quoi d’ailleurs ? Je préfère ne pas le savoir.

À voir passer tant de choses autour de cet album, je me devais de pousser mon petit coup de gueule. Critiques musicaux, par pitié, donnez-nous de la liberté, de la diversité, du choix d’opinion. Assumez vos impressions. Faites votre job. Parce qu’il y a des gens qui vous lisent, des gens qui vous suivent. Vous avez du pouvoir, servez-vous en correctement.

Quant à toi qui vient de subir ce billet d’humeur, sache que si tu n’aimes pas 22, A Million de Bon Iver, tu en as tout à fait le droit. High five, mec. Parce qu’on est visiblement seuls face au reste du monde.

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