Il était une fois un album culte : “Grace” de Jeff Buckley

CULTE – Il y a 20 ans, le Mississippi nous prenait Jeff Buckley. Le jeune homme est parti en laissant sur Terre une trace de son génie : l’album “Grace”. 

Jamais un album n’a aussi bien porté son nom. Grace. Sorti le 23 août 1994. L’album parfait signé Jeff Buckley. Le seul album que le chanteur sortira de son vivant. Les eaux du Mississippi nous l’ont enlevé alors qu’il allait lui donner un successeur. Jeff Buckley. Ouai, c’est un fils de. Le fils d’une super star de folk américain. Le père s’appelle Tim.  Physiquement, ce sont les mêmes. Mêmes yeux, mêmes cheveux indomptables, même voix qui accroche les notes les plus hautes. Même passion pour la musique. Le fils détestait le père pour les avoir abandonnés, sa mère et lui. Il se détestait de lui ressembler autant. Mais, ironie du sort, c’est grâce à Tim que le fils est repéré.

Tuer le père

En 1991 très exactement à l’Église St-Ann de New York est organisé un concert hommage : “Greetings from Tim Buckley“. L’organisateur a vite fait entendu parler du fils Buckley. On dit qu’il a un certain talent, on l’invite à se produire. Il chantera 4 titres, dont le fameux “I Never Asked To Be Your Mountain“. Une chanson qui traite de Mary Guibert et de Jeff Buckley. Une chanson que Jeff aimait et haïssait à la fois. Il modifiera les paroles de la chanson de sorte que la version du fils soit une réponse à celle du père. Classieux. Et, ce 26 avril 1991, soir du concert, il vole littéralement la vedette aux stars présentes ce soir-là. On loue la pureté de sa voix, sa qualité d’interprétation. Ce soir-là, la vie de Jeff Buckley a pris un tournant décisif.

Un a plus tard, alors qu’il se produit très régulièrement dans le Sin-é, un bar irlandais de New-York, il se fait repérer par Columbia, la grosse maison de disque qui accueille en son sein Bob Dylan, l’idole de Jeff. À l’époque, le chanteur n’a pas beaucoup de chansons, il ne chante quasiment que des reprises, mais les quelques morceaux qui lui appartiennent sont des pépites : “Last Goodbye” (baptisé Unforgiven), “Mojo Pin”, “Grace”, “Eternel Life”.

Multiples facettes

Ces trois titres, on les retrouvera ensuite sur Grace, un album à la gestation très lente. Jeff voulait prendre son temps pour enregistrer. Et c’est d’ailleurs sous la contrainte de sa maison de disque qu’il daigne enfin entrer en studio. En y pénétrant, le garçon ne savait pas vraiment ce qu’il voulait. On lui suggérait de ne faire qu’un album de reprises. Il en enregistra certaines. On les retrouvera d’ailleurs dans Grace (le fameux “Hallelujah”, “Corpus Christi Carol” et “Lilac Wine”). Les autres seront écrites pendant les sessions studios. “So Real”, par exemple (enregistré en une seule prise).

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Bluesy, rock, folk, jazz, lyrique, romantique, désabusé, enragé, mélancolique, jaloux, amoureux, Jeff Buckley est tout ça. Il mélange, mixe, revisite, se permet tout, et tout lui réussit. Sa voix, sa technique, son sens de la mélodie donne à Grace une aura quasi mystique. Jimmy Page dit de cet album qu’il est le meilleur de la décennie 1990. Il a 18 ans aujourd’hui, et n’a pas pris une ride. Il sonne toujours aussi moderne, toujours aussi actuel, toujours aussi parfait. “Je veux faire un album qui fasse oublier Led Zeppelin II” disait-il. C’est peut-être chose faite.

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