On y était : RY X au Divan du Monde

Paris, un lundi en début de soirée. Une file de trentenaires se meut lentement devant le Divan du Monde, dans une lourde chaleur, qui précède l’orage. En terrasse, juste en face, Ry Cuming, boit un verre paisiblement. Ils sont tous là pour lui. Enfin pour RY X, son nom de scène. C’est sa première étape de tournée européenne, et la salle affiche complet depuis un temps. Quand on s’engouffre dans le Divan du Monde, la chaleur nous compresse comme un étau et nous oblige à ôter les quelques vêtements qu’on avait pu préparer la veille pour le lendemain. Faroe (Concrete Knives) ouvre pour RY X. En solo pour la première fois ce soir, on le sent impressionné par l’enjeu. Pourtant il passe des claviers, à ses loops avec aisance, n’hésitant pas à mêler quelques boucles de guitare électrique à ses instrus, tantôt planantes, tantôt dance. Il pose sa voix d’une timide justesse sur ses compos. On ne comprend pas bien toutes les paroles en anglais mais on se laisse emporter sur “Blast” ou encore “A Lot Better Now”. Cela-dit, il n’y a pas encore de superlatif adequat pour qualifier cette pop-électro classique. C’est bien fait, mais ce n’a, pour l’instant, rien d’original. Histoire à suivre.

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Pendant le changement de set, l’excitation grimpe, la salle se remplit d’un voile de fumée opaque alors qu’un technicien allume discrètement des trios de bougies sur scène. Deux pianos se font face. Enfin ce qu’on croit être des pianos droits. Il s’agit en fait de pianos électriques camouflés, bardés de multiples voyants lumineux et options en tous genres. Dans le fond, quelques guitares font pâle figure, alors qu’une batterie électronique encadre l’un des pianos. 21h05, les lumières s’éteignent, Ry Cuming son bonnet, son manteau, et ses deux musiciens (Jens et Eric) rejoignent le devant de la scène. Plus possible de se cacher derrière un x d’une énième collaboration ou d’un x d’anonymat. Ry X est en tête d’affiche, pour son projet solo, et se met à nu pendant un tout petit peu plus qu’une heure, devant un public compressé et moite.

Si je me faisais l’avocat du diable, je vous dirais de but en blanc, qu’un concert de Ry X ne s’apprécie pas dans une salle comme le Divan du Monde (qu’on adore toutefois). Le public se laisse petit à petit vaincre par l’immobilité (ou du moins le low tempo) de la musique, ne sachant sur quel pied danser. L’atmosphère est étouffante, la fosse est compacte, la chaleur intense. On oscille en rythme, mais il est difficile de faire guère plus. Car Dawn, ce sublime premier album s’écoute et s’apprécie selon nous lors d’un trajet en transport, lors d’une nuit de pleine de lune lové dans sa couette, ou encore après une nuit arrosée alors que l’on rentre chez soi à l’aube… Ou bien dans un salon, une salle à taille humaine, assis par terre, l’esprit à la dérive… Dawn est difficilement présentable devant un par-terre chauffé à blanc. Cela étant dit, impossible de prétendre que je n’ai pas aimé retrouver fidèlement ces chansons, orchestrées avec finesse et justesse, dans la retenue caractéristique de ce projet. Jamais un beat de basse ou de percus ne prendra la tangente, tout semble subtilement millimétré, jusqu’à la guitare folk que Ry X joue avec pudeur sur “Sweat”. On est petit à petit corseté dans cette torpeur ambiante dans laquelle nous plonge le falsetto lunaire de l’Australien. Le set est bien ficelé, suivant presque la tracklist de l’album. Entre chaque nouvelle chanson, un “hit”, en témoigne le “YES !” satisfait d’une woogirl en entendant enfin les première notes d'”Only”. Sur scène, les corps se balancent, sans brusquerie aucune, et l’artiste ne cesse de remercier Paris, qui sait demeurer “so quiet and so present” à la fois, “it’s something rare” ajoute-t-il. On aurait aimé lui retourner le compliment.

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Setlist  : Shortline/ Salt / Hold Me Love / Sweat / Berlin / Deliverance / Howling / Lean / Fumbling Prayer / Only