Bror Gunnar Jansson : du solo au trio, le retour gagnant
LIVE REPORT – Voilà un artiste qu’on aime voir et revoir du côté de Strasbourg. Bror Gunnar Jansson était de passage à La Laiterie pour présenter son dernier album.
C’est à Strasbourg que j’ai découvert cet artiste-là, sur la regrettée petite scène du Camionneur. Je restais scotchée par un Suédois en one-man-band, qui transformait le blues en expérience extatique à coup de batterie en chaussettes bigarrées, de chapeau à plume, d’harmonica bien placé et d’énergie incroyable à la guitare. Après cela, mon chemin a souvent croisé le sien, à l’occasion de ses régulières venues ici ou à Paris. Si l’effet était toujours fou, je commençais à sentir sur moi les limites de cette formation solo. Il y a deux ans, je finissais par espérer peut-être de nouveaux musiciens.
Ambiance dark venue du nord
Parce qu’avec And The Great Unknown, son précédent album, Bror Gunnar Jansson commençait à abandonner la folie des débuts pour se plonger dans l’introspection et l’intensité. Et cela, je le sentais, nécessitait plus de mains. C’est ce qu’il a continué à faire avec They Found My Body In A Bag, sorti en septembre dernier. Il prend désormais le temps d’installer des ambiances plus dark et d’explorer des atmosphères pleines de cordes et de menaces planantes. Un côté western du froid pas déplaisant sur album, mais impossible à maintenir en one-man-band.
C’est donc en trio que je le redécouvre sur la scène du club. Avec beaucoup d’appréhension il faut dire, car même si je peux parfois vouloir le changement, rares sont ceux qui sont passés du solo au trio avec succès aux yeux de mon petit cœur. Mais il est évident aujourd’hui que Bror Gunnar Jansson ne fait pas partie de cette liste. Pour lui, le trio est un coup de génie. Le genre à te filer une claque inattendue.
Le blues expérimental et stoner
Longs passages instrumentaux, rythmes effrénés de batterie, basse diablement solide, la présence de deux musiciens supplémentaires permet à Bror Gunnar Jansson de proposer un nouveau blues sur la brèche, oscillant entre l’expérimental (“Det stora oväsendet”) et le stoner (“Stalker”). Stefan Bellnas, derrière sa basse, est la force tranquille tout en denim, long cheveux gris et sagesse de l’expérience d’un mec qui en a vu d’autres. Nils Petter Lindmark, derrière sa batterie, fait danser ses baguettes avec toute la délicatesse et la force nécessaires, dans un ballet gracieux soudain frénétique, les yeux fermés. Ces trois-là se sont bien trouvés.
Et comme un clin d’œil aux fans de la première heure, le set, fait de vagues et de ressac, de longues montées en puissance et de puissants retours à la terre ferme, laisse tout de même une belle part au solo. Trois titres que Bror Gunnar Jansson interprètera seul derrière sa propre batterie, dont la parfaite “Butch”. Histoire de nous rappeler comment il est arrivé là. Exactement le genre de set qu’on aime. Et qu’on n’attendait pas.
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