On a écouté : Bon Iver, Bon Iver
Bon Iver est un sujet sensible chez moi. J’aime, voire j’idolâtre ce barbu américain qui m’a tant faire pleurer avec son premier album For Emma, For Year Ago. J’écoutais, et écoute toujours en boucle les chansons qui en sont issues, avec toujours la même passion, et la même pointe d’émotion sans jamais me lasser. Des écoutes successives, encore et encore qui virent presque à la paranoïa obsessionnelle. De l’eau est passée sous les ponts, et des rivières ont coulé. Voilà qu’on annonce un nouvel album de Justin Vernon, porté par un premier titre : “Calgary”. Évidemment, on est une nouvelle fois bouleversé, et on se dit que l’album dont il est issu ne peut être que grandiose.
Le fait est qu’à la première écoute on est vraiment bouleversé. Dans quel sens, là est la question. Maître Vernon a pris des risques et s’est éloigné de l’intimiste Emma, et de son émotion brute. Les arrangements sont plus riches, et étoffés, des cuivres et d’autres cordes ont fait leur apparitions afin d’apporter un plus (pas nécessaires) aux mélodies anciennement composées à la sèche guitare. A la première écoute, je me suis surpris à penser « j’aime pas. C’est vraiment bizarre ». Et puis, le choc de la première écoute passée, je me suis re-penchée sur la question en me disant : « il ne pouvait pas nous faire deux fois la même chose ». Non, bien sûr que non. Justin Vernon pour son deuxième effort devait se réinventer, et pour les fans de l’homme, on le savait, il n’est pas qu’un folkeux à l’émotivité exacerbée pleurant seulement une relation amoureuse qui a touché à sa fin. On se rappelle bien sûr de ses errances avec Volcano Choir ou encore Gayngs. Une fois ces projets remémorés, j’ai réalisé que non, en fait ce nouvel effort n’est pas si surprenant.
Expérimentations sonores
A l’instar de Sufjan Stevens, Justin Vernon a décidé d’aller plus loin dans les expérimentations. On ne comparera pas les deux, mais j’avoue quand même avoir fait le parallèle. Pour la recherche sonore, la prise de risque et les mélodies alambiquées et compliquées parfois.
Mais, les bases folk demeurent évidemment. Le garçon cependant n’hésite pas à mélanger les cartes, lorgner du côté bluesy/soul ou même de l’électro (comme dans l’étrange “Hinnom, TX”). La marque du barbu reste là : reverbe, voix haut-perchée, et cette atmosphère toujours calfeutrée maintes fois imitée par ses pairs, avec plus ou moins de succès.
Certains titres sont bouleversants (“Holocene”, “Michicant”, “Wash”), mais il y a tout de même un raté qui empêche cet album d’être absolument parfait comme a pu l’être Emma : le titre “Beth/Rest” qui ferme l’album. Là, on se dit que Justin a justement été trop loin dans les expérimentations, et s’est lamentablement planté. Trop clinquant. Trop de synthé. Trop eigthies. Il s’apparente à la bande-son d’un vieux téléfilm que nos parents pouvaient regarder. Fausse note dans la discographie qu’on lui pardonne volontiers tant le reste est magique. Étrange. Pas mauvais. Grandiose. J’aime. Je ne sais pas. Alambiquée… Oui, je crois que je l’aime. Un peu cet album. Beaucoup. En fait.
Beggars/ 4AD. Sortie le 20 juin. En concert au Trianon le 29 octobre.
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