On a écouté : Lost in the Dream de The War on Drugs
The War on Drugs, c’est un peu le grand frère de Kurt Vile. Enfin, surtout Adam Granduciel, son chanteur/guitariste. Lorsqu’ils se sont rencontrés et qu’ils ont découvert qu’ils avaient les mêmes influences ils décidèrent de s’entraider. C’est ainsi que Granduciel aida Kurt Vile à boucler son premier album, Constant Hitmaker et qu’il intégra les Violators, son backing band. De son côté Kurt rejoint le groupe d’Adam, The War on Drugs. On avait donc deux groupes comportant une bonne part de musiciens en commun et dont les influences étaient similaires. Ceci, jusqu’au décollage de la carrière de Kurt Vile avec Smoke Ring for My Halo où il dut se recentrer sur son projet et quitter The War on Drugs. Peu après, Adam Granduciel fait de même pour les mêmes raisons et quitte les Violators pour s’occuper de la sortie de son second album, Slave Ambient.
Nous voici donc en 2014 pour le troisième album de The War on Drugs, le bien nommé Lost in the Dream. On évolue dans les brumes créées par l’enchevêtrement d’instruments et magnifiées par l’excellente production de l’album. Rien n’est précipité, tout se fait lentement et de façon naturelle (si on met l’interlude “The Haunting Idle” de côté, seuls “Lost in the Dream” et “Red Eyes” sont en-dessous de la barre des cinq minutes, et encore, cette dernière fait 4’57″). De l’inaugural “Under the Pressure” (8’51”) au final “In Reverse” (7’41”), on est donc bercé par les guitares et les claviers shoegazants qui créent une ambiance homogène sur tout l’album, offrant le cadre idéal pour la voix d’Adam Granduciel et d’où parfois émerge une ligne de guitare entêtante qui fait basculer le groupe vers un psychédélisme béat (“An Ocean in Between the Waves, Disappearing“).
L’album a été difficile à composer, débuté en 2012, Granduciel a lutté pour obtenir le résultat qu’il souhaitait (tout comme Kurt Vile, il compose ses albums quasiment seul), n’hésitant pas à recommencer de zéro “An Ocean in Between the Waves” deux semaines avant la date où il devait rendre l’album finalisé à son label, fin 2013. Tout est extrêmement travaillé, fouillé, calculé, et pourtant, le résultat est d’une étonnante spontanéité. Avec une composition qui s’étale sur autant de temps, c’est carrément à une tranche de vie que l’on assiste, sous forme de thérapie pour la dépression d’Adam (“Suffering“, et le désertique “The Haunting Idle“), émaillée de quelques éclats (“Red Eyes“) pour finir par reprendre goût à la vie (“Eye to the Wind“, “Lost in the Dream“, “In Reverse“).
J’ai pris mon temps pour écrire cette chronique, après avoir écouté l’album en boucle pendant un moment, je l’ai volontairement délaissé pour vérifier si l’intérêt ne disparaissait pas passé l’emballement initial. Verdict : absolument pas. Tout comme Smoke Ring for my Halo de Kurt Vile il y a trois ans, on peut d’ores et déjà considérer Lost in the Dream comme un de ces classiques dont on se souviendra encore dans vingt ans. À déguster au calme, sous un rayon de soleil.