On a écouté : “Temple” de Matthew & The Atlas
Q Magazine, la Bible britannique de la presse musicale l’a surnommé le Bon Iver Anglais… Rien que ça. Matthew Hegarty est une pierre précieuse, pure et merveilleusement bien taillée. Une pierre précieuse qui tient une place discrète parmi les pierres les plus tapes-à-l’oeil, riches que de leur apparence. En 2010, il monte son projet, appelé Matthew & The Atlas, et sort deux EP consécutivement, To The North et Kingdom of your Own. Il signe chez Communion Records. Enfin, Communion Records est créé pour signer Matthew. Bear’s Den, Catfish & The Bottlemen, Frances, Twin Peaks viennent désormais renforcer le catalogue du label anglais. Il faut attendre avril 2014 pour finalement écouter Other Rivers, son premier album folk épuré, pulsé par l’omniprésence de synthés. Il ne lui faut que quelques mois, pour enregistrer son second album, Temple. Tu sais bien ce qu’on dit, quand on sait où on va, la route est bien plus courte.
Temple est un album d’une flagrante honnêteté musicale. Un huis-clos à Farnborough, au sud-est de Londres, allié à une discipline d’acier ont permis à Hegarthy d’accoucher de ce bijou, qui valse d’une pop-folk allègre à des ballades planantes d’une beauté brute. Un passage par Nashville et un travail avec le duo Foreign Fields plus tard, et Temple est né. “Temple” est d’ailleurs l’un des titres emblématiques de cet album où musique allante et réflexions personnelles s’affrontent. We wanted to remember, everything that we have forgotten we wanted to believe , that we were note faded (…) we were just lonely kids, living in a faded town. Alors que les claviers et la basse marquent les temps métronomiquement, une batterie avec un timbre sonore matérialise ce temps qui s’échappe, cette vie qui s’effrite inexorablement, ce temps que l’on ne parvient plus à capturer, à mettre sur pause où à stopper définitivement, quoi que l’on fasse. Un thème que l’on retrouve dans “Mirrors” notamment : My time is getting shorter, I see I’m changing in the photographs ou dans “On A Midnight Street” : we were living in the dark (…) we were living in a dream et toujours ce passé révolu que l’on scrute à la loupe, dans l’espoir d’en tirer une morale salutaire.
Au delà de ces titres plus pop, on trouve également de sublimes ballades en piano-violoncelle, “When The Light Hits The Water” où le compositeur-interprète se livre encore plus personnellement : we can’t go on, living in reflexion, i don’t want you to feel alone, but that lost it after shadow, and I can’t seem to let go. Ou en guitare électrique-voix dans “Can’t You See” : you should know, there’s a lot to live for, and I won’t let you do it alone, ’cause I’m on your side if you need me there, and you’re in my mind all the time… On adore également l’atmosphère planante et insaisissable de “Glacier”. Pendant que Matthew Hegarty nous montre l’étendue de son timbre de voix et affirme It’s alright to give up de sa voix brumeuse, un piano discret et paisible, se fait peu à peu envelopper par des cordes. Sublime. Enfin, comment ne pas mentionner “Modern World” et sa rythmique avenante, et de la touchante “Elijah” qui une fois sur deux nous fait monter les larmes ?
Un mot ne cesse de revenir dans cet album de Matthew & The Atlas. FADED. Quand on part à la recherche de sa traduction française, on tombe sur décoloré/passé/délavé/estompé/fané… Temple est pourtant un album pépite, un album à la beauté presque sauvage. Et si Temple est résolument tourné vers le passé, il est emprunt d’une mélancolie radieuse, d’un fin rayon de lumière qui parvient à nous réchauffer l’âme et le cœur.
Temple, sortie le 22 avril 2016 (Communion/Caroline International).
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