Festival d’été de Québec jour 1 : Karim Ouellet, Heymoonshaker, Charles-Auguste et Francesco Yates
Ça ne s’annonçait pas franchement bien au petit matin. Et puis le midi la pluie s’est intensifiée, aidée dans ses sévices par un vent plutôt violent. En salle de presse pourtant on est confiants, et on nous dit avec optimisme que le mauvais temps n’est qu’un mauvais moment, que cela va s’arrêter pour le début des concerts. On essaye d’y croire, avec nos pantalons imbibés d’eau et nos cheveux dégoulinants. Et pourtant… premier apprentissage du jour, sachez que les organisateurs du Festival d’été de Québec ont toujours raison, car lorsqu’on se rend à notre premier concert de la journée, il ne pleut plus, et quelques rayons de soleil parviennent tant bien que mal à percer à travers les nuages denses. C’est parti !
La pluie s’est arrêtée pour notre 1er concert à Québec, c’est un signe. Au loin, les rythmiques folk ensoleillées de Charles-Auguste et son band nous attirent au Coeur du FEQ, nouvel espace convivial installé sur la colline en face du Parlement du Québec. Une batterie presque exotique, une contrebasse sautillante, une guitare acoustique et une électrique, le quatuor alterne ballades tristes de “peine” et les morceaux plus allants, qui nous transportent dans des atmosphères confinées. Charles-Auguste souriant, raconte des histoires en français, de sa jolie voix grave et profonde, entre deux anecdotes sur l’orgie de chocolat du band dans la loge (“Chocolat”) ou sur sa colocation avec son camarade guitariste, et leur désaccord sur la meilleure façon de boire des smoothies, pour lancer une de leur “chanson d’appartement” au ukulélé. Et comme il le dit “pour un boysband on n’est pas si pire”, ils sont même pas pire du tout. En band ou en solo acoustique sur “Henri Ford”, Charles-Auguste se place tout droit dans la nouvelle génération des interprètes québécois audacieux qui savent y faire avec la langue française décomplexée, que ce soit des histoire d’haleine de blondes au matin ou sur des sujets plus sérieux amenés de façon guillerette. Le band conclut son set par “Bébé Beluga” et les quelques danseurs présents de si bonne heure se lancent à cœur joie dans un petit swing jovial.
[bandcamp width=100% height=120 album=1406006591 size=large bgcol=ffffff linkcol=e99708 tracklist=false artwork=small]On repart place d’Youville, et on retrouve Heymoonshaker. Les Anglais vont droit au but, ils sont là pour un seul et unique jour et ils ont bien l’intention pour nous rendre “happy”.
Fidèles à eux même, Dave fait le show en fran-glais entre deux chansons, allant chercher les courageux venus braver le temps capricieux de la journée. Ça gesticule des bras, ça pose, ça se fait des regards complices, ça fait des blagues et ça envoie sévère ! Et dire qu’ils ne sont que deux sur scène… On aime ou on n’aime pas, mais impossible de ne pas être bluffé par la palette de sons qui sortent de la bouche de Dave (“Heavy Grip”). Les festivaliers sont littéralement bouches bées quand ce-dernier nous laisse entrer “dans sa tête” et qu’il monopolise la scène avec un solo de beatbox incroyable que l’on vit intensément à travers ses mouvements corporels. Mais comment fait-il ça !? Le set habituel se poursuit à coup de chansons “sexyness” (“Feel Love”) qui peuvent te faire “finir à poil si tu ne fais pas attention”, de moments promo avec le fameux album donné par Dave himself (qui est donc descendu de scène pour l’occasion) à un bout de chou du public, et de regards noirs d’Andy qui crache ses tirades rock avec son timbre éraillé en fixant le public d’un bout à l’autre. C’était puissant, c’était bon.
Suite de la soirée à la scène Loto Québec avec le phénomène Francesco Yates. Dès la 1re chanson, le Canadien parcourt chaque recoin de la scène telle un cabri relâché à l’état sauvage. Quelle énergie ! Ce protégé de Pharrell signé chez Atlantic Records, délivre un show pop-rock sensuel et dynamique à l’américaine, à coup de gros riffs de basse, d’amplitude vocale complétée de vibratos théâtraux, de jeu de séduction avec les 1ers rangs, de poses photogéniques, de “baby baby” et de lumières aveuglantes. On sent bien distinctement l’influence que Michael Jackson et Prince ont eu sur l’artiste dans sa (courte) jeunesse. On pense aussi forcément à Justin Bieber… Le garçon sait y faire ! Que ce soit dans ses chansons qui restent en tête (“Magic Touch”, le hit “Sugar”) dans ses solos délirants de guitare, dans ses séquences groovy as can be (“Change the Channel”), ou seul sur scène en clavier-voix, notre attention est curieusement happée par ce garçon à la chevelure folle et au talent indéniable.
Quand j’ai avoué à Karim Ouellet quelques heures plus tôt que je l’avais vu pour la première fois à l’Astral à Montréal, sa réponse ne s’est pas fait attendre : ça faisait bien longtemps. Bien trop longtemps à mon goût également. Entre temps, on avait quand même eu la chance de le voir à La Loge à Paris en duo pour un set en très (très) petit comité en comparaison à ce que ce showman aime présenter à son public canadien. Ce soir, c’est lui la tête d’affiche de cette journée d’ouverture sur la deuxième plus grande scène du festival. Normal, “c’est un gars d’ici” me confirmait quelques heures auparavant son attachée de presse. Le Québécois est donc venu à pied pour présenter son nouvel album “Trente”, le troisième. Et après un spectacle au Métropolis à l’occasion des Francofolies de Montréal, il nous faisait grande hâte de revoir ce garçon qu’on adore.
C’est avec un déguisement identique au dessin qui figure sur son dernier album, que Karim Ouellet débarque sur scène, entouré par ses deux choristes et cinq musiciens (deux cuivres), tous vêtus de maillots de basket. Il interprète bien sûr des titres de son dernier album, “Dans la nuit qui tombe”, “Les Roses”, “Coeur gros” ou encore l’excellente “Karim et le Loup” avant de sourire aux lèvres “Fox”, ou encore “L’Amour”, pour un public plus que ravi de réentendre les titres les plus connus du chanteur. Il en profite pour lui demander directement son avis : “pour ceux qui étaient là la dernière fois, est-ce qu’on s’est amélioré ?”. Le vent souffle fort dans le parc de la Francophonie, mais le public répond présent sur la durée, pour 1h20 de show avec : un jeter de ballons de plage en plastique, un Claude Bégin (son acolyte de toujours) dans une balle transparente porté par le public, deux duos, un lever spontané de téléphones portables sur “Trente” se balancant en rythme… et une chorale d’enfants venue soutenir Karim sur “Marie-Jo”. Définitivement le moment le plus “cute” du concert. Il est bientôt 23h, le temps est passé si vite. Se réunissant sur le devant de la scène, toute l’équipe de Karim salue, alors que “Magic” de Pilot les raccompagne jusqu’aux coulisses. On repart le coeur léger en chantonnant “Ho, ho, ho, it’s magic, you know, never believe it’s not so…”. C’est bien vrai, c’était magique.
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Photos : Emma Shindo