Rencontre d’un génie et d’un public à l’Autre Canal avec Tamino
LIVE REPORT – L’évidence nommée Tamino est venue ensorceler le public nancéien vendredi soir. Un public qui n’a pas toujours su réagir face à tant de beauté.
Ouverture de soirée avec Elia. Elle intrigue dès la première chanson, avec sa très jolie voix mise en valeur par un simple son de clavier ou quelques boucles électroniques. Malheureusement, le tableau se gâte rapidement lorsqu’elle fait tomber son clavier. Ce n’est pas tant l’incident qui pose problème, mais sa réaction. Celle de ne pas se baisser : “je ne porte pas, un technicien va venir m’aider”. Combinaison rose trop transparente ? Ou refus de casser son “image” ? Sur le coup, les questions se multiplient, pendant qu’elle comble le silence par un discours sur sa musique. Elle explique qu’elle adore la musique acoustique mais qu’elle est “obligée de mettre des kicks et des snares, des trucs un peu violents sinon les gens zappent”. Voilà. C’est à ce moment-là qu’elle m’a totalement perdue. Les autres titres n’y feront rien. Dommage pour sa voix.
Et puis Tamino arrive enfin. En début de semaine, le jeune belge avait été obligé d’annuler un concert pour cause d’extinction de voix. Qu’allait donc donner cette date ? Les peurs s’envolent très vite, heureusement, avec les premiers titres. Et se déroule ensuite un concert encore une fois merveilleux.
Savoir gérer la perfection
Mais il est toujours épatant de voir à quel point chaque concert nous ramène à cet état d’émerveillement, d’admiration, de respect et de profonde gratitude devant tant de talent. Cela n’a visiblement pas été facile à gérer pour tout le public nancéien. C’est qu’il est rare de croiser la route d’un tel artiste. Rare de savoir comment réagir autrement que par quelques “à poil!” presque timides quand Tamino présente ses deux talentueux et “sexy” musiciens, Ruben VanHoutte et Vik Hardy. Ceux dont on ne peut que reconnaître l’immense capacité à jouer la note juste, la finesse attendue, la profondeur espérée.
Difficile aussi de réagir autrement qu’en chantant en chœur les plus splendides chansons. Ceux-là l’ont j’espère appris, on n’accompagne pas de fausses notes des titres pareils lorsqu’ils sont chantés par Tamino en face de vous. On évite également de taper dans ses mains sur la reprise que Tamino chante en rappel en solo. Ce titre si délicat, si étonnant, si étrangement taillé pour lui de Mac DeMarco, “My Kind Of Woman”… Ce titre-là méritait un silence de cathédrale.
Grandeur épique et inoubliable
Mais on ne peut pas vraiment en vouloir au public. Car même si Tamino laissera entendre quelques faiblesses de-ci de-là, difficilement perceptibles (un rythme un peu rapide sur “Indigo Night”, une gorge un peu sèche sur quelques notes d'”Habibi”), comment savoir réagir devant tant de perfection ? Devant un groupe si parfaitement à l’unisson qu’il rend épique des titres de 10 minutes, aux instrumentations d’une richesse propre aux plus grands compositeurs de musique de films ? Mon dieu, quelle beauté que ce “Each Time”… Quel incroyable voyage soudain, vers ces contrées qui d’emblée vous font penser à Lawrence Of Arabia, à ces déserts sans fin, à ces périples à dos de chameau… Impossible de ne pas penser à cette phrase de Churchill d’ailleurs utilisée dans ce film. “I deem him one of the greatest beings alive in our time… We shall never see his like again. His name will live in history. It will live in the annals of war…” Remplacer “war” par “music” et voici la description parfaite de Tamino.
Alors a-t-on vraiment tout dit, tout écrit sur Tamino ? Peut-être. Mais on n’aura jamais tout ressenti. À l’heure où ces trois artistes extraordinaires nous ont quitté sur “Smile”, à l’heure où les frissons étaient montés, où les tremblements avaient été incontrôlés, où les larmes avaient coulé après l’explosion de ce titre, après la démonstration de tous les possibles, après l’indescriptible, tout le monde l’a su. On a tous su qu’on retournerait voir Tamino quoi qu’il en coûte. Où qu’il soit. Encore et encore.