Velours Velours : “C’est un beau sentiment de plénitude de sortir son premier album “
INTERVIEW – On a papoté avec Velours Velours qui vient de sortir “Quand je pleure, je suis content”, son premier album aux neuf chansons qui s’écoutent comme du beurre salé qu’on tartine sur du pain chaud.
Beaucoup de nouveaux albums québécois arrivent en ce début d’année 2025. Notamment, le tout premier de Velours Velours, Raphaël Pépin-Tanguay dans la vraie vie, qu’on a déjà régulièrement vu évoluer sur scène, accompagnant ses bons amis (Étienne Coppée entre autres) ou participant aux Francouvertes l’année dernière.
Après la sortie d’un EP en 2022, et plusieurs singles en 2024, il était temps de passer à l’étape supérieure. Quand je pleure, je suis content est paru le dernier jour de janvier et écrit entre Montréal, Québec, Tadoussac, Sainte-Anne-Dds-Monts, Abercorn et Saint-Zénon. Réalisé par Christophe Charest-Latif (ex Mort Rose, Vanille, Allô Fantôme), il bénéficie d’un casting 5 étoiles. Le vibraphone d’Étienne Côté (Lumière), la pedal steel de David Marchand (zouz), les “oreilles précieuses” de Philippe Brach, la harpe d’Emilie Kahn (feu Emilie & Ogden), les chœurs de Marie-Pierre Arthur… C’est un bien joli petit album, comme quelques pages arrachées d’un journal intime, qui commence en douceur, quelques soupçons de mélancolie, pour ensuite nous relever le menton, sécher nos yeux embués et nous donner envie de profiter de la vie et de nos tous nos proches.
Comment tu te sens après la sortie Quand je pleure, je suis content, ton 1er album ?
Vraiment bien. On dirait que l’album a pris une autre dimension cette fin de semaine depuis que j’ai fait des shows et que j’ai pu rencontrer un peu le public. Je n’avais pas réalisé à quel point c’était bizarre de sortir un album et d’avoir une réception presque exclusivement virtuelle. Avoir un feedback direct, dans une salle, entendre le monde chanter les tounes, de pouvoir jaser après avec le public, de voir les gens contents, avoir leurs retours… ça donne beaucoup plus de sens ! Je suis content de l’avoir enfin fait !
Tu m’étonnes ! C’est quelque chose un premier album quand même.
Surtout que ça faisait un petit bout qu’on travaillait dessus. On avait juste hâte de le sortir. C’est fait, et c’est un beau sentiment de plénitude.
Qu’as-tu préféré dans tout ce processus de création ?
L’enregistrement reste vraiment un moment particulier. J’ai beaucoup aimé cette étape-là. Je me suis efforcé de le faire dans des conditions que j’ai trouvées le fun, sur lesquelles on va pouvoir tripper en band. On est allé faire les basics au Studio Wild pendant une semaine avec tout le band, à enregistrer, à souper, à dormir… C’était vraiment un trip d’amener la musique dans ce contexte-là, posé, amical, convivial, et qui permet beaucoup de libertés. J’ai quand même aimé la période de fin de composition aussi, qui n’était pas longtemps avant la période d’enregistrement. Mais je ne suis pas dans un mode solitaire pour faire de la musique, ça me parle moins que d’enregistrer avec mes amis et d’aller en tournée pour jouer tous ensemble.
“Je me verrais difficilement faire autrement que de travailler avec mes amis !”

Tu as mentionné tes amis. Forcément, je dois te demander comment ça se passe de travailler du début à la fin avec ses amis et ses proches ?
Je me verrais difficilement faire autrement ! C’est ce qui rend mon métier spécial : je peux me permettre de le faire avec ces gens que je choisis. Du monde en qui j’ai une confiance presque aveugle. Des gens qui sont prêts à me suivre dans mon ambition. Du monde avec qui on peut se défier, se remettre en question, essayer des affaires sans avoir peur… Cette ambiance confortable qui vient de l’amitié pousse l’exploration encore plus loin. J’ai choisi ces gens-là pour leur amitié et la confiance que j’ai envers eux. Mais aussi, car ce sont des personnes de grand talent avec des esprits créatifs qui me parlent beaucoup. On se ressemble, donc on s’allie dans tout ce processus, on se pousse ensemble dans la même direction.
C’est cool d’avoir des amis talentueux !
Ouais, (rires) je suis très chanceux à ce niveau-là !
“On ne devient pas nécessairement artiste à cause d’une blessure, ça peut venir de raisons très lumineuses.”
Pour écrire un premier album, penses-tu qu’il faut forcément avoir souffert, vécu quelque chose d’important ou avoir eu le cœur brisé par exemple ?
C’est différent pour tout le monde. Certains diraient que oui, d’autres que non, d’autres diraient que ça n’a pas de rapport avec comment ils se sentent. Pour ma part, ça a quand même un lien direct. Mes chansons touchent beaucoup à des thèmes relationnels ou parlent d’émotions. C’est beaucoup du vécu, du ressenti, des observations… Je suis influencé par ce qui m’entoure et la façon dont ça m’affecte. Mais la pulsion de créer peut venir de partout. On ne devient pas nécessairement artiste à cause d’une blessure, ça peut venir de raisons très lumineuses. Je pense qu’on peut créer à partir de n’importe quoi, ça ne prend pas forcément une brisure ou une pulsion. Ça prend quelque chose pour t’inspirer, quelque chose qui vient te happer d’une certaine manière. L’amour est le plus grand thème de l’art, la plus grande source d’inspiration. C’est un très bon moteur, mais je ne sais pas s’il est nécessaire. Je serais curieux de découvrir plus tard quelle sera ma source d’inspiration.
As-tu en ce moment une chanson préférée dans ton album ?
Pour le moment, c’est toujours la même depuis l’enregistrement : “La fin”. Je trouve qu’elle se démarque de tout mon répertoire. Déjà, c’est la seule qui a un drum machine, instrument qu’on ne retrouve sur aucune autre chanson. J’aime beaucoup sa vibe planante, il a quelque chose de très constant sur toute la toune… J’aime beaucoup les mélodies, les arrangements, j’aime la chanter ! C’est une chanson vraiment complète, qui a tout le package.
En écoutant une première fois ton album, j’étais team “Je sais”. Puis, en le réécoutant je pense que je vais plus vers “Parc des compagnons” qui clôt ton album.
Je suis surpris car “La fin” et “Parc des compagnons” sont les préférées de beaucoup de monde ! Avant de sortir l’album, beaucoup de monde du label disait préférer “Je sais”. Chacun a une préférée alors qu’on aurait pu tous tripper sur les singles uniquement. C’est très varié !
As-tu des conseils, autre qu’écouter “Yeah” pour rester content, sans pleurer, surtout en ce moment ?
(rires) Il faut prendre le temps d’emmagasiner tout ce qui se passe. D’en prendre, d’en laisser… On est tous dans l’empressement et à fleur de peau. Personnellement, ça va quand même bien, je suis très chanceux et équilibré. J’explique beaucoup ça parce que j’ai beaucoup de temps pour me laisser aller, penser à autre chose, penser à moi et à rien, marcher, prendre l’air et le soleil… J’essaie juste de me préserver. C’est important de prendre le temps de ne rien faire et de s’écouter. Ne pas toujours penser aux États-Unis ou à son travail, sans totalement en faire abstraction car ça reste important. Il ne faut pas s’en rendre malade…
Il y a plein d’instruments dans tes arrangements, cuivres, cordes, pedal steel… Comment est-ce que tu vas réussir à traduire tout cet univers et cette atmosphère sur scène, notamment lors de ton lancement ?
Pour le lancement, on a décidé d’y aller straight-forward, avec le vrai band, à six. On n’invitera pas les brass, le quatuor à cordes, le marimba… On avait envie d’un show dans son plus simple appareil. En plus du band, on aura tout de même notre ami Mikhael (Daoudi) qui est percussionniste et qui a souvent fait des shows avec nous, ainsi que Flavie (Melançon), ma gérante qui va venir faire des back vocals. On s’est surpris à redécouvrir que les arrangements du live marchaient quand même en petite gang. Quand on enregistrait l’album rien qu’à six ça sonnait déjà bien… et puis le show va être cool ! (sourire).
“Beaucoup de mon apprentissage musical s’est fait dans les orchestres.”
Est-ce que c’est quelque chose qui te tenait à cœur tous ces instruments “en plus” sur ton album ?
Ça a toujours fait partie de moi ! J’ai toujours imaginé ça au niveau des textures et des sonorités, sans forcément composer en pensant à ça. Beaucoup de mon apprentissage musical s’est fait dans les orchestres, notamment au secondaire (12-17 ans ndlr) où je jouais des cuivres dans l’harmonie (orchestre sans cordes ndlr) et dans l’orchestre symphonique. Les arrangements orchestraux m’ont toujours aussi beaucoup plus dans la musique que j’écoutais. Dès l’EP (Fauve sorti en 2022), c’était clair que pour moi il y allait avoir un quatuor à cordes, d’autant plus que la violoniste de mon band (Florence Labelle) est aussi une arrangeuse de grand talent. On ne pouvait pas passer à côté ! Je suis aussi chanceux d’avoir des amis qui peuvent venir jouer du cor français (cor, ou cor d’harmonie ndlr) sur quatre des mes tounes !
Tu disais dans une interview que ton album serait sans doute compliqué à défendre en festival ou sur de grosses scènes extérieures. Pourtant Alexandra Strélinski a rempli les plaines d’Abraham lors du Festival d’été de Québec l’année dernière. Tout est possible, non ?
C’est vrai ! Je n’avais pas encore joué l’album en live quand j’ai dit ça. On était en show cette fin de semaine (à Sherbrooke ndlr) et en fait ça prend juste un public intéressé et de l’écoute pour défendre cet album. Car il y a des chansons qui ne sont pas aussi “directes” que d’autres que je jouais avant, comme “Tournesol”, la fin de “Je t’aime” ou “L’énorme chien très gentil” où tu peux juste en profiter et y aller avec le rythme. Tandis que dans l’album je trouve qu’il y a moins de tounes évidentes. Avant de le jouer live, ma vision était que ça serait plus difficile de rentrer dedans, mais les gens et les shows de ces dernières semaines m’ont prouvé le contraire. J’ai hâte de présenter et de faire découvrir cet album-là en spectacle !
Quand je pleure, je suis content – Velours Velours (Bonbonbon)
Propos recueillis par Emma Shindo
Crédit photo : Camille Gladu-Drouin
Lancement le 1er mars à la Sala Rossa (Montréal) et au Grand salon de l’université de Laval (Québec) le 20 mars.