Revolver : “Le public américain est très expressif. Il fallait le convaincre” (Interview)
Revolver se sont lancés dans une tournée gratuite de quelques dates en province pour faire écouter leur nouvel album, Let Go, qui sortira le 12 Mars. L’idée est de faire venir les fans dans des lieux sympas et à petite capacité d’accueil, à Lyon c’était la péniche le Sirius. On écoute quelques titres en acoustique (c’était absolument magnifique, trop court mais suffisant pour une belle chaire de poule et les prémices d’une larme), le groupe paye sa bière et le nouvel album tourne en fond sonore ! Un concept qui ne pouvait que me plaire venant d’un groupe qui lui me plait déjà beaucoup, beaucoup, s’il était utile de le rappeler ?! Swann devait les rencontrer à Paris mais a préféré tester la véracité du fantasme du serrurier qui dépanne en urgence (Bonjour Madame, mmmm je viens réparer ta serrure!) et j’ai donc volé ses questions et foncé sur les quais de Rhône pour un entretien pré-concert, en toute simplicité, autour d’une bière, donc… J’ai de la chance : le groupe est volubile, ce nouvel album c’est beaucoup de boulot et d’excitation, voilà ce qu’ils en disent :
Comment se passe cette tournée de lancement dans des endroits aussi intimistes?
Jérémy : C’est la 1e fois qu’on fait ça, c’est assez génial, on a commencé la semaine dernière, on ne fait que passer, on joue quelques morceaux en acoustique, Rennes, Nantes, Lille, c’est un contact vraiment direct et hyper simple avec les gens.
Quel accueil vous réserve le public ?
Jérémy : Tout le monde à l’air super content de venir, d’écouter les morceaux. Et puis nous surtout on est heureux de jouer !
Ambroise : C’est un truc qu’on n’avait jamais fait en province, on avait beaucoup fait ça à Paris étant parisiens, dans des petits endroits, des bars, des péniches, chez des amis… Mais on ne l’avait pas fait depuis longtemps, et ici en province on trouve des gens qui découvrent, donc pour nous c’est hyper agréable.
Christophe : les gens sont surpris, ils n’arrêtent pas de nous le dire. Ils ne nous attendaient pas sur un évènement comme ça et on est heureux de leur réaction !
Chez Rock’n Fool nous avons eu la chance d’écouter le nouvel album, c’est une nette évolution, un véritable changement. C’est vous, on reconnait VOTRE son mais on pense à plein d’autres, naturellement on rapproche de ce que l’on connait et spontanément Wind Song m’a évoqué Phoenix, non ?
Jérémy : Phoenix ce n’est pas vraiment une influence, en tout cas dans l’écriture on n’a pas d’influence venant d’eux. Julien notre producteur a pas mal bossé avec eux c’est vrai, et c’est un groupe qu’on aime tous les 3 beaucoup. Quand on était aux Etats-Unis, on les a beaucoup entendus, ils sont devenus « big » là-bas, et les entendre sans cesse dans tous les supermarchés où on entrait, on avait un sentiment super nationaliste, c’est des français, nous aussi et ils ont réussi là-bas !
Christophe : Dans le son de la rythmique, dans la batterie, on peut comprendre le rapprochement, c’est très carré, et en même temps assez groove, le côté mélodie mélangée à ce groove assez sec, c’est effectivement peut-être pour ça qu’on entend des similitudes…
Les 2 tournées aux US ont-elles influencés le nouvel album ?
Ambroise : cela a énormément nourri notre évolution en général. Je dirai qu’elle a vraiment commencé au démarrage de la tournée du 1e album et elle a fini avec l’enregistrement du 2e. Il y a eu 2 ans et demi de tournée intensive, à sillonner toute la France, l’Europe et donc bien sûr les Etats-Unis. Mais déjà jouer devant autant de villes différentes en France ça a été un choc énorme pour nous ! On a découvert que les gens dansaient sur notre musique !
Math : oui, c’est vrai je me souviens au Ninkasi à Lyon il y a 2 ans, on avait méchamment dansé !
Ambroise : oui, c’étaient les débuts, on ne s’y attendait pas du tout, on a trouvé ça énorme et du coup on s’est dit qu’il nous fallait plus de morceaux pour que les gens puissent danser ! Et même que ça soit des slows, que les gens puissent danser ensemble, d’où notamment « The Letter » sur le nouvel album.
Jérémy : on avait déjà l’habitude de reprendre des slows sur scènes, on aimait bien faire danser les gens…
Ambroise : En fait les Etats-Unis cela nous a encore plus donné envie d’aller dans ce sens là. Quelque part ça a été un peu des « débuts » à la fin de la tournée, une tournée plus roots qu’une tournée française, dans des conditions plus difficiles, des petits clubs…
Jérémy : on est inconnu aux Etats-Unis donc forcément on doit tout prouver, personne ne nous attendait sauf dans les grandes villes où il y a une communauté française, mais dans les petites villes les gens venaient sans connaitre.
Math : C’est bruyant dans les pays anglo-saxons, on vient au bar pour écouter de la musique et boire une bière.
Jérémy : Oui, puis le public américain est très expressif donc il fallait vraiment convaincre.
Christophe : Les Américains ne viennent pas que pour boire une bière, ils sont quand-même vachement intéressés par la musique, aux US cela fait partie de leur culture. Venir écouter un groupe pour eux c’est commun. En un sens c’est bien, mais du coup on a aussi beaucoup de concurrence là-bas. Il y a énormément de groupes qui chantent en harmonies vocales, et comme en France on est un peu LE groupe qui chante à 3 voix, si on allait aux US il fallait qu’on est un super niveau !
Jérémy : Les Etats-Unis ça a en fait encadré l’enregistrement et le mix aussi de l’album. Car juste avant de faire l’album on était en tournée là-bas, sur Février-Mars, ensuite on a répété un peu, on a fait l’album, puis on est retourné aux Etats-Unis à la rentrée sur Septembre-Octobre, puis on l’a mixé, donc on faisait beaucoup d’aller-retour entre les Etats-Unis et l’album. Certains morceaux ont été un peu influencé par ces voyages, mais les morceaux étaient déjà écrits avant cette tournée. Donc sans dire que cela a apporté des touches musicales supplémentaires, cela nous a surtout beaucoup soudé en tant que groupe. Les conditions de tournée là-bas étaient très compliquées, en octobre on a fait 26 concerts, en 28 jours, dans 26 villes différentes ! On était dans un tour-bus avec un autre groupe français, les Château-Marmont, que l’on ne connaissait pas trop, avec qui ça s’est très bien passé mais du coup humainement c’était assez intense. En fait l’expérience américaine nous a surtout rendus encore plus soudé, solidaire à l’arrivée.
Les harmonies vocales sont toujours aussi présentes et donc encore plus belles grâce à cette cohésion ?
Réponse chorale (!) : oui carrément !
Jérémy : Surtout qu’aux Etats-Unis on ne s’entend pas chanter donc il faut tous chanter plus fort et plus juste !
Ambroise : oui je pense qu’on chante beaucoup plus fort après une tournée américaine ! (rires)
L’accueil là-bas y a été bon ? Vous avez prévu d’y retourner bientôt?
Ambroise : Oui effectivement, donc on commence notre tournée par la France en avril et mai, et ensuite les Etats-Unis en juin normalement.
La musique classique est moins présente sur le nouvel album, pourquoi ?
Ambroise : cela vient du fait que l’on n’en fait plus beaucoup en ce moment. Lors du 1e album cela faisait vraiment partie de nos vies, Jérémy faisait encore de la direction d’orchestre, moi je venais d’arrêter mes études de chant lyrique, c’était très présent. La musique classique fait partie de notre bagage musical, de nos références et de nos racines. Mais au même titre que Simon and Garfunkel, des Kinks ou d’Elliott Smith aussi… On est ouvert à d’autres choses mais le classique c’est notre socle.
Christophe : la tournée nous a vraiment permis de découvrir un tas de musiques que l’on ne connaissait pas. Ces nouvelles influences s’entendent beaucoup dans le nouvel album et les anciennes s’y sont un peu noyées dedans, on les entend de moins en moins.
Beaucoup de vos chansons ont changé entre leurs premières moutures et la sortie du studio. C’est le cas apparemment de « When you’re away » qui était à votre goût trop « beatlesienne »… Qu’est-ce qui ne vous plaisez plus ?
Ambroise : Oui c’est une chanson très McCartney, un peu trop en fait, mais en même temps on l’aimait bien cette chanson, donc on s’est dit qu’on allait s’amuser un peu avec.
Math : la 1e chose qui m’est venue à l’esprit en l’écoutant c’est Vampire Week-end !
Jérémy : les parties de guitare et de batterie un peu africaines, ce mélange pop et musique africaine ça rappelle un peu Vampire Week-end. C’est un morceau au rythme chaloupé, super agréable à jouer en tout cas !
On doit souvent vous en parlez mais pour le 1e album vous avez défini votre musique comme « pop de chambre », pour le nouvel album quelle est la nouvelle définition ?
Ambroise : De la pop de stade ! (ironie !)
Jérémy : C’est difficile d’inventer des étiquettes. La pop de chambre ne disparait pas complètement. Ce soir quand on passe en trio comme ça, c’est de la pop de chambre, et c’est comme ça que les nouveaux morceaux ont été écrits. Mais cet album est beaucoup plus rythmé et dansant que le premier.
La guitare électrique est beaucoup plus présente !
Christophe : l’électrique oui, mais la batterie surtout prend plus de place.
Jérémy : oui et on a accordé aussi plus de place au caractère et à l’atmosphère des morceaux. J’ai l’impression que c’est peut-être ce qu’il manquait au premier album. Cela nous semblait vachement important de jouer aussi sur les contrastes, cela manquait parfois entre les morceaux, ou même dans les morceaux. Là sur Let Go il y a beaucoup de morceaux dont le son évolue au fil de la chanson. On nous a dit que le 2e album était moins intimiste que le 1e, et en même temps les moments qui sont vraiment intimistes sur le 2e le sont car ils sont mis en valeur par d’autres morceaux plus spectaculaires ou plus rythmés qui les encadrent. Le contraste était vraiment ce dont on avait besoin…
Un peu de pression par rapport à la sortie du nouvel album ? Par rapport au véritable engouement qu’avait suscité le premier ?
Réponse chorale : Ouep !
Jérémy : Beaucoup d’excitation et un peu de pression forcément car le 1e on allait de surprise en surprise, on ne s’attendait pas à signer avec une maison de disques, ni à faire un disque, ou avoir un morceau qui passe à la radio. Alors que là on attend un peu tout ça et on a envie que cela fonctionne, donc il y a une sorte de suspens ! Mais c’est surtout beaucoup d’excitation en attendant le 12 mars. On l’a tellement muri cet album, on y a mis tout ce que l’on pouvait, on ne pouvait pas faire moins ou plus à ce moment là, donc maintenant on a hâte que ça sorte !!
Il était temps de laisser les Revolver à leurs fans qui pouvaient simplement venir leur serrer la main. Leur état d’esprit à la veille de la sortie de l’album ? Vous l’aurez compris il est enjoué, rieur, dansant, grave et sautillant à la fois, bref, contrasté à l’image de Let Go. Pour finir cet entretien où les goûts musicaux des uns et des autres furent souvent évoqués, je ne pus m’empêcher de leur tendre une perche pour une cover spéciale dédicace. Nous sommes tous les 4 fans d’Elliott Smith et de John Frusciante, voilà, tout est dit… Vous aviez l’air emballé, la balle est dans votre camp les garçons, Rock’n Fool attend de vous publier maintenant !
Propos recueillis par Mathilde C.
Crédits photos : Caroline Kapikian