“Three Billboards” : la croisade vengeresse d’une mère

CHRONIQUE – Alors que la parole des femmes se libère, “Three Billboards : Les Panneaux de la vengeance” raconte l’histoire d’une femme qui veut retrouver le coupable du meurtre et du viol de sa fille.

C’est un petit bijou. Un film qui ne fait pas de bruit en France. Three Billboards rafle tous les prix. Meilleur scénario à la Mostra. Meilleur film dramatique aux Golden Globes. Meilleur film britannique aux Bafta. L’actrice principale, Frances McDormand, a aussi été auréolée du prix de la meilleure actrice dans cette dernière cérémonie. Le film est nommé aux Oscars dans la catégorie reine. Il fait face à d’autres poids lourds : Shape of Water, Call Me By Your Name, Pentagon Papers ou le petit Lady Bird. Entre autres.

L’histoire ? Celle d’une mère de famille, Mildred Hayes, qui décide d’apposer un message poignant sur trois panneaux publicitaires à l’entrée de la ville. Lettres noires sur fond rouge : “Violée pendant qu’elle agonisait il y a plusieurs mois. Toujours pas la moindre arrestation. Pourquoi, shérif Willoughby ?”. Cela fait des mois que cette mère a perdu sa fille et devant l’absence de mouvement dans l’enquête, elle décide d’interpeller la police locale avec ce message controversé qui va mettre en émoi la petite ville d’Ebbing, Missouri. C’est le début pour Mildred d’une véritable croisade vengeresse.

Malgré les intimidations, les insultes, les moqueries, cette mère courage va faire preuve d’une force à toute épreuve pour que justice soit rendue au nom de sa fille. Elle force l’admiration. Le visage marqué, déterminé, même si son corps semble à bout, ses yeux sont d’une incroyable détermination. Ses yeux parlent à la place de sa bouche. Le rôle semble avoir été écrit pour McDormand, incroyablement habitée.

Dans la veine des Frères Coen

Si le sujet qu’a décidé d’aborder Martin McDonagh est dur, il l’entoure d’une atmosphère très douce-amère, à la manière des Frères Coen. D’ailleurs, il en reprend les codes. Que ce soit la ville perdue au milieu de rien, ses dialogues parfaitement construits, les personnages hauts en couleurs, souvent idiots ou incultes, et des situations parfois rocambolesques. Mildred est cette femme héroïque et futée au milieu d’un océan d’hommes parfaitement incompétents. À commencer par la police, gangrenée par des flics totalement à la ramasse, parfois même ouvertement racistes. Le racisme, c’est le deuxième combat de Martin McDonagh dans à la tonalité féministe. Sans être moralisateur. Le réalisateur choisit la carte de la noirceur mais surtout de l’humour (noir) et de la dérision pour traiter de ces thématiques. Des séquences légères se calent entre deux scènes anxiogènes ou violentes, apportant un peu de respiration dans l’ambiance souvent pesante. Three Billboards est ce genre de films inclassables. S’il est présenté sous l’étiquette “dramatique”, il n’y a pas totalement sa place. On ne sait pas vraiment comment le qualifier sinon d’ovni. De surprise. Reste à savoir si l’Académie des Oscars suivra les Golden Globes.

Pour mémoire, les nommés, dans la catégorie “meilleur film”, sont :

Call Me By Your Name (Luca Guadagnino)
The Shape Of Water – La Forme de l’eau
(Guillermo Del Toro)
3 Billboards, Les panneaux de la vengeance
(Martin McDonagh)
Les Heures sombres
(Joe Wright)
Phantom Thread
(Paul Thomas Anderson)
Pentagon Papers
(Steven Spielberg)
Lady Bird
(Greta Gerwig)
Dunkerque
(Christopher Nolan)
Get Out
(Jordan Peele)

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