Lana Del Rey : la dépression sensuelle et l’ultraviolence
J’aurais voulu que Lana Del Rey se plante sur cet album. Tu vois j’étais jalouse. Oui, tout un fait. Pour “Ultraviolence”, elle a travaillé avec mon grand fantasme, Dan Auerbach des Black Keys. Et en plus, elle a eu le culot de dire qu’il ” s‘est passé un truc physique” entre eux. On ne veut pas trop savoir ce qu’il s’est passé dans le minuscule studio de Nashville. Ce qu’on sait, en tout cas, c’est qu’en six semaines, ils ont enregistré un putain d’album.
Disons-le d’emblée, clairement Ultraviolence ne sera pas la bande-son de ton été. Sauf si, bien évidemment, t’as envie de déprimer sévère et puis de te flinguer le cerveau. Ce deuxième album, en vrai, est ultra déprimant. Pesant. Étouffant même. Mais si sexy et si planant à la fois. Elle est chiante, Lana, à enfiler les paradoxes comme ça. J’admets avoir été hyper déroutée à la première écoute. Je m’attendais à avoir une succession de ” National Anthem “et” Summertime Sadness “, bref des tubes pour NRJ. Dieu merci, Dan a eu l’intelligence de ne pas céder aux sirènes de l’hyper mainstream. Étrangement, il l’a fait avec les Black Keys et l’album poubelle “Turn Blue “. Pour Lana Del Rey, c’est autre chose. Il lui a façonné un album pas franchement facile d’accès, mais hyper cohérent. Quand Born to Die avait tendance à s’éparpiller, Ultraviolence est un bloc unitaire. Ambiance noire et crépusculaire, réverbération à foison, guitares saturées et une orientation musicale qui trouve sa source musicale dans le blues, la soul, le rock. On est loin du jazz-gansta et du phrasé hip-hop du premier album et ça fait du bien. Lana laisse tomber Nancy Sinatra pour Nina Simone et d’ailleurs elle reprend ” The Other Woman” de manière très lyrique et très années soixante. Du premier album, la pin-up garde toutefois les cordes orchestrales, les mêmes qu’on pouvait entendre sur ” Video Games “ou “Born To Die “. Ce qu’il y avait de meilleur finalement.
La vie en noire
Si l’ambiance est pesante, les paroles aussi. Lana s’affirme en tant qu’auteure et partage ses états d’âme, son blues et sa déprime dans des chansons franchement tristes. Rappelle-toi ce que Musset disait: les chants désespérés sont les plus beaux. Encore une fois, ça se confirme. Ce qui est drôle (enfin pas tant que ça), c’est que lorsqu’elle a fait écouter ses maquettes, Lana était persuadée d’avoir écrit des chansons heureuses. Sauf que c’est tout le contraire. Quelques jours avant la sortie Ultraviolence, la jeune femme a une prise de conscience et résume son album de la sorte : “il est tellement sombre, qu’il en est presqu’inaudible”. Il est vrai que dans le monde de Lana, on voit la vie en noire.
En résumé: on retient que chez Lana, le monde est cruel, que ses histoires d’amour sont assez chaotiques et violentes, qu’elle est une sad girl et que les garçons pleurent aussi. Ce n’est pas ce qu’on appelle des chansons heureuses. Dans Ultraviolence (t’as bien évidemment relevé la référence à d’Orange Mécanique ), Lana Del Rey te raconte aussi sa réalité, le cauchemar américain. Le sien. Celui de la paumée et ratée Lizzy Grant qui devient du jour au lendemain la pin-up que tout le monde idolâtre et déteste en même temps. La lumière, Les paillettes, évidemment qu’elle en rêvait mais les critiques acerbes sur son look vintage, sa voix pas encore maîtrisée, ses lèvres pulpeuses, sa moue boudeuse, tout ça, elle s’en serait bien passée. Elle le dit “They judge me like a picture book by the colors, like they forgot to read“. Maintenant qu’elle s’est débarrassée de ses artifices, de ses couronnes de fleurs, de ses ongles trop longs et boucles d’oreilles trop grandes, bref tout le bling-bling, on peut se pencher sur le livre de Lana et on se rend compte que, merde, on est toutes des Lana Del Rey. Une nana qui n’est pas tout à fait bien dans sa tête, une nana tourmentée, une nana amoureuse du mauvais garçons (Comme.Nous.Toutes), qui le sait et qui retombe toujours dans ses bras au premier coup de fil.
On pourrait détester cet album parce qu’il est sombre, violent, pesant et déprimant. Mais étrangement, c’est tout le contraire. On l’aime parce qu’il planant, langoureux et terriblement sensuel. Oui, on se surprend à aimer cette ambiance lourde et on écoute le spleen de Lana d’une seule traite. De “Cruel World “à” Black Beauty “. Qui aurait cru un jour que la dépression pouvait être aussi sexy à écouter?
TOP 3 d’Ultraviolence
“Sad Girl”
[youtube=https://www.youtube.com/watch?v=MrlWP0dc-Es]“West Coast”
[youtube=https://www.youtube.com/watch?v=oKxuiw3iMBE]“Old Money”
[youtube=https://www.youtube.comwatch?v=S4lim6J5X-E]