Rhum For Pauline : “On ne faisait pas confiance à nos morceaux. On les trouvait un peu vides”
Rendez-vous au Motel, entre Ledru-Rollin et Bastille. Quand j’arrive, Romain (chant) pianote dans sa bulle, sur son clavier, casque sur les oreilles. Je retrouve Émile (batterie), avant que Romain vienne se joindre à nous, pour leur dernière interview de leur marathon de journée promotionnelle. Les Nantais viennent de sortir (enfin) leur premier album, Leaving Florida après trois EPs, et une pause de trois ans. On les découvre.
RockNfool : Premier projet de carrière avant la musique ?
Romain : J’ai toujours voulu faire chanteur…
Émile : Pareil…
Sérieux ?
Émile : À un moment je me suis dit que ce n’était pas possible et qu’à la place j’allais bosser dans la prod’ de concerts.
Romain : Je pensais être comédien, mais ce n’est pas très éloigné.
Émile : Désolé, t’as l’air hyper déçue de nos réponse (sourire).
Je m’attendais à des métiers un peu plus funky j’avoue…
Romain : Comme “j’ai toujours rêvé d’être croque-morts” (sourire).
Émile : Je crois que quand j’étais vraiment petit, à 4-5 ans, je voulais être ébéniste, j’avais une passion pour ça…
Romain : Tu t’en sors d’une certaine manière ! (rires)
Émile : “Je casse du bois quoi !” Non mais vraiment musicien en premier.
Premier concert en tant que spectateur ?
Romain : J’avais 5 ans, c’était à l’Olympia, c’était Henri Dès.
Le premier concert où vous êtes allés tout seul comme des grands ?
Romain : The Kills et Franz Ferdinand à La Trocardière. C’était le premier vrai concert où j’avais acheté ma place avec mes sous, et je suis allé voir le groupe que j’écoutais en boucle à l’époque.
Émile : Moi je suis quasi sûr que c’était La Rumeur. Voilà.
Premier CD que vous avez acheté ?
Émile : Princes de la ville de 113.
Romain : C’est un bon album ! Greatest Hits de Queen pour ma part.
Première claque musicale ?
Émile : Je pense qu’on peut estimer qu’une claque musicale arrive à l’adolescence et elle te fait remuer le sang pour la première fois. Le premier album des Clash.
Romain : Kid A de Radiohead.
Émile : On a des univers différents…
À ÉCOUTER >> Le clip du jour : “Pan Peter” de Rhum For Pauline
Première rencontre de votre nouvelle formation ?
Émile : On ne s’est pas séparé en fait, on a juste recruté un nouveau guitariste (Antonin, ex-Pony Pony Run Run ndlr.)…
Romain :… qui a été une rencontre décisive c’est certain. Son arrivée dans le groupe a été quelque chose de très important, on s’est vraiment dit à ce moment-là qu’on était prêts à faire un album en bonne et due forme.
Émile : Il y a eu des petits changements qui sont importants sur le long terme. Notre première rencontre quand Thibaud et moi avons rencontré Romain…
Romain :… a aussi été une rencontre décisive. Notre identité s’est peaufinée à ce moment-là puis s’est précisée avec le temps. Mais le nom, et l’identité de Rhum For Pauline, même à l’époque de Miami, notre premier EP, c’est vraiment lorsque Émile et Thibaud sont arrivés dans le groupe.
Émile : Au début Rhum For Pauline était un duo de folk avec Romain et un autre mec à l’époque, lorsqu’on était au lycée à Nantes. Moi je jouais dans un groupe punk. Il y avait quelques groupes de jeunes, on se connaissait tous, on était potes et on regardait les nombres de lecture sur Myspace des uns et des autres. On les avait invités à jouer en première partie à cause d’une annulation. Ils m’avaient proposé de venir jouer de la batterie sur l’un de leur morceau que j’adorais, juste pour ce concert-là. Vu que ça avait bien marché, ils m’ont proposé de venir faire un concert avec eux. Pour travailler je leur avais demandé de m’envoyer toutes leurs chansons, dont je n’étais pas très fan. En écoutant leurs compos, je me suis rendu compte qu’ils avaient juste un problème d’arrangement car leurs chansons étaient des putains de bijoux. Je leur ai dit que je venais avec un bassiste et on a joué ce concert-là électrique. C’était il y a 7 ans, et c’est le point de départ de notre groupe tel qu’il est maintenant. Et c’était que pour un concert à la base…
Donc votre premier concert c’est celui-là ?
Romain : Oui c’était à Nantes.
Émile : À la scène Michelet…
Romain : Le 23 juin 2008, c’était chouette !
Première idée de nom de groupe ?
Romain : (rires) Des idées de noms de groupe de que je tairai… Rhum For Pauline ça vient de ce duo folk qui existait au tout début, en jouant avec Romain et Paul, nos deux prénoms.
Première répétition ?
Émile : Notre première répet’ à 4, on a du jouer quatre morceaux dans un local, ça a été très rapide. J’avais des idées d’arrangements, chacun a fait son truc. Quand j’ai rejoins Rhum For Pauline avec Thibaud, le bassiste, on avait tout juste fini le lycée, et je me disais “on va monter le super groupe”, avec ceux qui pour moi était le meilleur chanteur, le meilleur bassiste… Le feu sacré quoi !
Romain : On était excités comme des puces car on avait une micro-notoriété, on commençait à faire de plus en plus de concerts, on voyait la métamorphose opérer pendant nos répet’…
Premier studio ?
Romain : C’était également à la maison quartier de Doulon.
Émile : Il y avait Raph’ et Quentin qui étaient venus nous enregistrer car on leur avait proposé de faire une reprise de Continue de Minitel Rose dans laquelle ils jouaient tous. On avait enregistré complètement à l’arrache…
Romain : Et nous c’était un tant soit peu actés qu’on allait arriver chez FVTVR, et comme premier essai, eux avaient cet EP avec un nouveau single de Minitel Rose et quelques remix, et ils nous avaient proposé de faire une cover de ce titre, qu’on avait adapté en soul. La cover était plutôt cool, on l’a écoutée récemment.
Émile : Des micros posés comme on peut, on avait oublié de mettre le métronome, donc le rythme… le mec fait un solo de guitare et on crie tous pour le féliciter sans se rendre compte que ça enregistrait.
Premier chanson écrite ensemble ?
Émile : Peut-être Boyshake Lady ?
Romain : Walker’s Lament.
Émile : C’est la première chanson de notre premier EP, qui était vraiment notre préférée et qui a failli ne pas être sur l’EP car on l’a composée deux jours avant d’entrer en studio. C’est une chanson qu’on vient d’arrêter de jouer, on est passé à autre chose. Vraiment une très bonne chanson, très rock.
À REGARDER >> Walker’s Lament pour SUN Nantes.
Première première partie ?
Émile : Les Bewitched Hands à l’Olympic, une salle qui n’existe plus sous ce nom, elle est devenue le Stéréolux. C’est un ancien cinéma dans un vieux quartier de Nantes. On était super chauds. C’était le soir de la sortie d’un bouquin sur les 20 ans de la salle, du coup il y avait tout un tintouin. C’est un très bon souvenir, même si on n’avait pas fait un très bon concert car on n’avait jamais joué sur une scène aussi grosse. Les trois mecs devant étaient statiques (rires). Il y a d’ailleurs toujours la vidéo report sur internet.
Premier festival ?
Romain : Les Transmusicales ? (réfléchit) Oh non, ohlala…
Émile : C’était juste après notre premier concert à quatre. Un festival en Vendée, pas loin de chez nous. Il y en a beaucoup dans cette région, beaucoup de chansons française engagée…
Vous vous souvenez du nom ?
Émile : Ouais ouais, on va y venir (rires). Le bassiste n’avait pas pu venir au dernier moment, donc on avait fait le concert guitare+batterie+chant, ce qu’on ne ferait plus aujourd’hui. Mais à l’époque on s’en foutait. Et le festival s’appelait…
Les deux : La bouillie à Sosso !
Émile : On avait dormi dans le foyer des jeunes de Cheffois, et mon souvenir le plus marquant c’est la photo de Michel Jonasz sur le mur, dédicacée aux jeunes du foyer.
Première chose que vous faites quand vous montez sur scène ?
Romain : Je regarde le public, je jauge la salle.
Émile : J’essaye de ressentir les gens. Prendre quelques secondes de pause pour canaliser l’énergie… et essayer de d’en servir.
Romain : Pour saisir dans quelles dispositions ils sont…
Émile : Et démarrer le concert de la meilleure manière qui soit.
Et première chose que vous en sortez ?
Émile : Des shot de vodka en général… qui sont déjà prêts.
Romain : On pensait qu’on allait devenir des stars après les Transmusicales. On était un peu immatures.
Première désillusion ?
Émile : Quand on est allés aux Trans’, on était jeunes, on pensait qu’on allait être des stars deux mois plus tard. Erreur de jeunesse. On s’est rendu compte qu’il fallait qu’on bosse, qu’on n’était pas tout à fait prêts, un peu immatures…
Qu’est-ce qu’il s’est passé ?
Émile : On avait bien joué, mais à l’époque on misait beaucoup sur l’énergie, on ne faisait pas confiance à nos morceaux, ils étaient sans doute un peu trop vides. On avait joué vers midi, devant un public plutôt nombreux, en Découverte…
Romain : J’avais la voix abîmée aussi…
Émile : Et c’est suite à cette période là qu’on a pris trois ans pour recentrer les choses, avoir un propos cohérent et écrire un album. C’était un moment douloureux mais déterminant.
Vous faisiez autre chose pendant ces trois ans de break ?
Émile : Quelques concerts pendant un an et demi puis un an et demi en studio. En parallèle on faisait le backing band de Pegase, on vient d’arrêter de le faire du coup.
Première grande fierté ?
Romain : Notre premier EP ? Avoir notre premier CD dans les mains c’est super émouvant…
Émile : C’était fou. Tu trouves ton disque à la Fnac, des articles de journaux en parlent… Et puis de là, un an après on pensait qu’on était des stars, donc tu vois (rires).
Rhum For Pauline, en concert au Badaboum le 4 novembre.
Propos recueillis par Emma Shindo