Nick Murphy écrit l’album dont on a tous besoin
AMOUR – On aimait Chet Faker. On a eu peur de s’en éloigner quand il est redevenu Nick Murphy. Avec Run Fast Sleep Naked, on sait maintenant que tout cela, c’était pour le meilleur.
Tu as déjà ressenti cette impression de totale incompréhension face au monde qui t’entoure ? Une incompréhension vis-à-vis des autres, que tu aurais envie de secouer de ne pas prendre conscience de l’urgence de la situation, du mur dans lequel on se dirige ? Mais aussi ce sentiment d’être toi-même incompris ? Cette peur terrible de ne peut-être jamais réussir vraiment à exprimer tes angoisses et que personne ne puisse en saisir la portée, pleinement ? Si tu as répondu oui à cela, alors ne t’inquiète pas. Nick Murphy est là
Etats d’âme universels
Nick Murphy (ex Chet Faker) a sorti Run Fast Sleep Naked il y a quelques jours. Rien que le titre, tu me diras, est une ode à un certain mode de vie dans lequel tu te reconnaîtras sûrement. Je ne te dirais jamais combien j’apprécie les artistes qui nomment leur album différemment de leurs chansons. J’y vois toujours un petit mystère à percer, ou une piste laissée à la libre interprétation. Une fenêtre sur les intentions profondes… Mais c’est un vaste sujet…
À l’intérieur de ce nouvel album, Nick Murphy étale au grand jour les considérations de plus en plus présentes chez nous pauvres trentenaires, coincés dans un monde qui ne nous convient pas. Sommes-nous en train de perdre la tête ? Que ce soit dans nos relations amoureuses, ou dans l’évolution consumériste de ce monde, sommes-nous sûrs de ce que nous faisons ? Sommes-nous en accord avec nous-mêmes ? Avons-nous envie de ce dont on a besoin ? Et au milieu de tout cela, cette recherche désespérée de l’autre… Celui ou celle en qui on se reconnaîtra suffisamment, avec qui on pourra être vrai, entier, et avec qui on pourra affronter tout ça en ayant un peu moins peur. Le chemin de croix pour se trouver soi, pour trouver l’autre. Et pour le garder. Ou pour s’en séparer.
Un masterpiece musical de liberté
Le talent de Nick Murphy est là. Mêler l’universel et le très personnel. Et savoir le faire tant en mots qu’en sons. Je sais que chacun pourra voir dans les paroles ce qu’il souhaitera y trouver. Là est l’universalité. Mais réussir la même chose avec la musique ? Quel tour de force ! Parce que, OUI, il faut avoir du génie pour nous donner la chair de poule avec les vagues sonores de « Hear It Now », puis nous faire remuer avec « Harry Takes The Drugs », jusqu’à nous faire complètement danser sur « Sanity ». Puis oser mélanger les beats électro universels, qui se mêlent aux batteries jazzy si pointues (« Novacaine and Coca Cola ») et tutoient les envolées de violons (« Never No ») ? Le tout sans jamais se départir de cette identité sonore construite dès l’époque de Chet Faker ? Qui, jusqu’à maintenant, était capable de se targuer d’une telle réussite ? Personne. Nick Murphy est l’artiste le plus à l’image de notre génération. La beauté de la réconciliation entre toutes ses contradictions.
L’exemple le plus frappant, s’il ne devait en rester qu’un, est sans nul doute « Believe ». Ce titre mériterait des discours incroyables. Mais soyons courts. Quelle noblesse. La pureté d’un piano-trompette-voix old-school remplacé progressivement par cette voix synthétique et ces sons électroniques, avant de relaisser la place au classique… À vous laisser sans voix.
La preuve que Nick Murphy était donc encore plus grand que Chet Faker. Il fallait le faire.