La fille qui ne comprenait pas le phénomène Fauve…
Ça grouille de jeunes gens hyper lookés. Des jeunes. Moyenne d’âge : 20 ans, voire même moins. Lunettes colorés, blousons en jeans beaucoup trop grands, noeuds pap’ même pour certains, chemises boutonnées jusqu’au menton, bonnet vissé sur la tête. Coupe de champagne à la main. Ce n’est pas le Wanderlust de Paris, mais l’EMB Sannois, ce soir le dernier groupe à la mode est de passage et la jeunesse hipsters a fait le déplacement. Le groupe c’est Fauve. Un phénomène, un raz-de-marée qui emporte Paris. Ils n’ont pas de support physique encore. Quatre titres à eux, quelques clips, et pourtant ils remplissent TOUTES les salles de concert. On ne parle que d’eux sur les réseaux sociaux. Twitter s’est enflammé lorsque Blizzard a été mis en ligne. Sur Facebook, pullulait une centaine de photos Instagram ratées de leurs passages à Bourges. Avec le même commentaire : « Fauve, ça tue ». « Fauve, tellement bien », « c’est le meilleur groupe du moment ». Fauve, c’est le truc qu’il faut écouter et aimer absolument. Et si tu n’accroches pas : c’est que soit tu n’as rien compris, soit que tu es un “hater”. J’ai essayé, je n’ai pas réussi. Mais je n’ai rien d’un “hater”… Sans doute, encore une fois n’ai-je rien compris. C’est possible.
On m’explique pourtant. “Fauve, tu vois c’est un peu nous, on peut s’identifier facilement à eux, à leurs paroles et à leurs textes“. « Fauve, c’est mieux qu’une séance de psy, ça parle de nos problèmes, ce sont les premiers à le faire ». « C’est un peu Nirvana de notre génération. Ça parle de nos problèmes à nous .» Mais l’amour, la haine, la peur, le mal-être, le manque, le temps qui passe, l’impression de ne pas être à sa place tout ça, ce sont des thèmes un peu récurrents, pourtant, dans la musique ?
On me dit que sur scène, Fauve ça déchire. Moi j’ai vu cinq mecs, geek sur les bords. Quatre regardent leurs pieds en jouant, immobiles, comme s’ils étaient dans un garage pour répéter. Le quatrième, celui qui chante, bouge tellement que 1. on dirait qu’il est sous coke 2. on ne comprend absolument rien de ce qu’il marmonne. Et « les paroles c’est ce qu’il y a de plus important chez Fauve ». On te parle de la scénographie démente… Ceci dit, c’est vrai les projos sont jolies. J’avoue que leurs vidéos hyper esthétiques sont très belles et intéressantes.
On me dit aussi que Fauve c’est un truc nouveau, qu’ils apportent « quelque chose de frais » (def : expression à la mode pour qualifier un groupe qu’on n’a jamais vu, mais dont on t’a déjà parlé). Ce qu’ils proposent, personne ne l’avait fait avant. Et si je dis Diabologum, tu fais le rapprochement ? C’est un peu pareil non ? En plus hype peut-être.
On dit que leur musique respire l’urgence. L’incarne même. Je me rappelle qu’on disait la même chose pour Wu Lyf. Evidemment, t’as déjà oublié ce groupe comète. Celui-là même qui est apparu dans la sphère musicale aussi vite qu’il a disparu… Fauve disparaîtra sans doute dans un an. Une fois que Paris, centre du monde musical c’est bien connu, aura trouvé un autre groupe plus obscur à idolâtrer. Ce soir-là à l’EMB, Paris est à l’EMB. Dans l’assemblée, un couple de jeunes gens se faufile au premier rang et me bouscule au passage. Bien plantés devant moi. La fille sort son Iphone, le mec son Galaxy 3. “Prends une photo, comme ça on pourra dire on y était. On s’en va ? On écoutera vite fait sur internet et puis on dira comme tout le monde que c’était trop bien“.