La Noce 2021 : Martha Wainwright, Safia Nolin, Sara Dufour et Belle Grand Fille
LIVE REPORT – De passage à Saguenay, on a fait une double halte au Festival La Noce pour assister aux concerts de Martha Wainwright, Safia Nolin, Sara Dufour et Belle Grand Fille.
Alors que l’été bat son plein, on est allé faire un tour du côté de Chicoutimi qui accueillait the one and only festival saguenéen. Cette année la Noce est de froment.
C’est ma première fois à la Noce et l’ambiance est conviviale à souhait pour cette édition covidienne. Ça fait du bien de retrouver le plein air, l’atmosphère festival et voir le public se retrouver, boire des coups, danser et chanter. Tout ça dans le respect des consignes sanitaires, bien entendu, comme l’a rappelé une voix polie entre deux concerts.
Belle Grand Fille et Sara Dufour : les filles du coin
Première soirée sous le signe régional avec Belle Grand Fille et Sara Dufour, des filles du coin. Deux univers différents malgré le lien géographique et des textes en français.
Belle Grand Fille est en formule trio pour son set ouverture de soirée. Derrière son piano, elle interprète les titres de son petit album Mini-maison. Visiblement ravie d’être là (multiples sourires à l’appui), sa douceur et son entregent sont la parfaite formule pour découvrir son univers léger, poétique et mélodique. On apprécie particulièrement l’intensité de “L’escalier” qui finit en une escalade d’intensité au piano-contrebasse-guitare, et sa délicate (mais non moins émouvante) reprise de “Le Vent m’appelle par mon prénom” originellement de Marie-Pierre Arthur. On est encore plus touchés quand elle avoue l’avoir beaucoup écoutée lorsqu’elle habitait à Montréal et qu’elle songeait à revenir dans sa région, au Lac.
Elle prend même le temps de nous faire plusieurs points hockey entre deux chansons pour ne pas manquer le 5e match de la finale Canadiens vs Tampa Bay. Heureusement pour nous, l’issue du concert de Belle Grand Fille avec “Ton grand rire” sera bien plus joyeuse que celle des Habs.
Retrouvailles avec Sara Dufour qui monte sur scène à la suite de Belle Grand Fille. On avait adoré découvrir au Verre bouteille lors d’un concert des plus mémorables. Même fougue et même enthousiasme à partager ses anecdotes ponctuées de son rire communicatif. Originaire de Dolbeau, de l’autre côté du Lac, Sara Dufour n’est pas une inconnue du coin. Elle parcoure le Québec de part et d’autre avec ses deux albums en boîte. Fière représente de sa région, elle nous parle d’amour déçu, de machines et de breakers, de son “expatriation” montréalaise à coup de rock endiablé, country-blues et chansons folk plus douces parfois, l’histoire de ralentir un peu le rythme. L’énergie concentrée dans cette artiste est digne d’un feu d’artifice. Elle n’hésite pas non plus à laisser place à ses quatre musiciens, visiblement aussi bouillonnants qu’elle. Encore une fois, un généreux concert devant un public de connaisseurs. Un spectacle qui réchauffe les cœurs et nos hanches à la fois.
Safia & Jésus dans la cathédrale
Dernier soir de vacances et retour à la Noce pour une soirée à la cathédrale de Chicoutimi. L’affiche était trop alléchante : Safia Nolin et Martha Wrainwright. Les reines de Québec et de Montréal réunies pour une soirée épurée, guitares-voix, dans ce grand édifice emprunt de solennité mis en valeur par d’élégants jeux de lumière.
Safia Nolin ouvre la messe. Accompagnée de Marc, guitariste et ami de longue date, la Québécoise brise la glace avec une nouvelle chanson. Un 3e album va certainement voir le jour en fin d’année (un premier single est sorti le mois dernier). C’est aussi le premier passage de Safia Nolin à la Noce. À la manière d’un Pierre Lapointe, Safia Nolin délivre ses chansons mélancoliques, parfois sombres, extraites de ses deux albums et bavarde avec le public, comme avec des ami.e.s. Elle avoue ne pas être capable de s’arrêter de parler”. Mais, sa spontanéité et son humour font partie de ses spectacles. Notamment quand elle nous fait chanter “Minuit chrétien” sur un coup de tête. La cathédrale prend des airs de 25 décembre un 8 juillet. On adore.
Trois nouvelles chansons nous sont présentées en plus de “Dagues”, “Dans le noir”, “Miroir” du dernier album et “La laideur” et “Technicolor” du premier album. L’harmonie des deux guitares (acoustique et électrique) est bien dosée, bien que parfois l’artiste s’accompagne seule pour alterner l’intensité. Notamment lors de la séquence micro-partagé (“Je ne comprends pas” suivie du duo “Lesbian Break-Up Song”). Pas une mouche ne vole. Pour cette fan de Jésus (c’est elle qui le dit), l’hommage est réussi. Ils doivent être fiers là-haut.
La démonstration Wainwright
“On ne m’a pas dit quand venir, alors je viens”. Martha Wainwright apparaît sur scène sans chichis, vêtue d’une veste en jean, un legging et des sneakers de sport. L’habit ne fait pas le moine. Loin de là dans le cas de Martha tant la performance est grande et remarquable. L’artiste anglophone fait l’effort de s’adresser à nous en français, tandis qu’elle change la tonalité de sa guitare à plusieurs reprises. Elle a courageusement fait l’aller-retour Montréal-Saguenay pour le concert. Elle nous explique s’occuper d’un camp d’été de jeunes organisé dans sa salle de concerts, l’Ursa, où elle est attendue le lendemain matin à l’aube.
Les prouesses vocales de la Montréalaises sont extraordinaires, et semblent être d’une facilité déconcertante. En plus des “I am a Diamond” et “Factories”, elle nous joue un tas de nouvelles chansons, tirées de son prochain album Love Will Be Reborn. Les mots clés, selon elle, seront : divorce, vieillir et enfants. On sait à quoi se tenir.
“Getting Older” et “Middle of the Lake” sont tout bonnement remarquables. Que ce soit par la maîtrise vocale que par l’accompagnement à la guitare acoustique toujours rythmé, varié et déroutant, c’est impressionnant. Elle invite également Safia à revenir sur scène. Les deux artistes partagent un micro sur “El Condor Pasa” de Simon & Garfunkel. La fusion des voix est saisissante. Martha Wainwright revient pour un rappel, fait à coup d’applaudissements et de roulements sur les bancs de la cathédrale. Dès que les premières notes de “Mother Mother Fucking Asshole” retentissent, l’excitation est à son comble.
Une réconfortante soirée intime (peut-on aussi dire divine ?) qui nous a fait perdre tous nos repères spatio-temporels le temps de quelques heures.
Photos : Emma Shindo
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