Soda Blonde : Small Talk mais grand album

CHRONIQUE – Sorti au début de l’été, “Small Talk” est le tout premier album de Soda Blonde. Le groupe irlandais ne déçoit pas, loin de là !

Comment ai-je pu passer à côté du 1er album auto-produit de Soda Blonde ? Le projet de quatre des cinq membres de (feu) Little Green Cars a abouti, début juillet, sur un long-jeu vraiment (très) bon. Impossible de ne pas vous en parler.

Après avoir partagé la nouvelle de leur séparation de Stevie Appleby en mars 2019, Faye O’Rourke (chant), Adam O’Regan (guitare), Donagh Seaver O’Leary (basse) et Dylan Lynch à la batterie annoncent la création de Soda Blonde. Terrible Hands leur 1er EP sort en novembre 2019, comprenant notamment la déchirante “Perfume” et l’éponyme “Terrible Hands” qui se fraiera une place sur l’album. Suit Isolation Content dont les titres ont été écrits et enregistrés pendant leur confinement (tous les bénéfices de cet EP ont été reversés à une association de demandeurs d’asile irlandais).

Deux EP qui s’éloignaient paisiblement de la pop-folk trad’ de Little Green Cars sans pour autant renier leurs origines et leurs forces. Les Irlandais se sont progressivement tournés vers une dream-pop qui flirte avec cette mélancolie harmonieuse et ce talent pour raconter des bouts de vie. Small Talk est cet album auquel on tend une oreille intéressée à la première écoute avant de s’y replonger avec excitation pour tout réécouter d’une traite et ne plus s’arrêter.

Cascade émotionelle

C’est d’abord un album aux mélodies accrocheuses et habiles portées avec brio par Faye O’Rourke dont le timbre de voix nous a toujours ému·e·s. Inutile de préciser que nous avions une tendance à préférer les chansons de Little Green Cars interprétées par cette chanteuse au timbre puissant et expressif qui nous fait vivre milles émotions à la seconde (“Try”, “I Still Have Feelings For You”).

Small Talk est sans surprise un album d’amour (We don’t have to get this right the first time / But I’m gonna try), de déceptions (It’s the way you carry on and the way that you lie / It’s under harsh lights, baby, we say our goodbye) et de doutes. Douze chansons écrites par Faye, à la première personne du singulier, qui s’inspirent de leurs vies, leurs erreurs (It takes everything to begin again), leurs craintes, leurs révoltes (You are nervous ’cause I am angry again / And it’s my body and I’ll cry if I want to) et leurs questionnements sur le futur (I know this isn’t a game to you / Giving up, I deserve it / You know I carry the shame of it / Like a child, kicking with torment / See, the thing is that I don’t know if I love you / And it kills me). Un condensé d’émotions brutes délivrées sans pudeur qui viennent immédiatement nous parler et nous toucher.

Derrière ces paroles personnelles et sincères, d’autres thèmes sous-jacents importants pour Soda Blonde : la religion versus la science, le bien versus le mal, le destin versus le libre-arbitre, écrivent-ils en ligne. Des angoisses sociétales, des batailles et des questionnements propres à notre génération.

Ne pas savoir où donner de la tête

Les arrangements chaleureux supportent intelligemment la ligne de chant consolidée par les (toujours aussi) belles harmonies qui caractérisaient Little Green Cars. Le synthé (“The Dark Trapeze”, “Love Me World”) et les apports électroniques (“Small Talk”) s’ajoutent aux accompagnements, sans pour autant prendre le dessus et réussissent à apporter cette touche atmosphérique contrastant avec l’intensité des textes.

Difficile d’extraire un top 3 de chansons de cet album bien pensé et consistant dans son entièreté. Entre la ballade romantique et épurée “I Still Have Feelings For You”, la sexy et chaloupée “In The Heat of the Night”, la lyrique et cinématographique “Tiny Darkness” avec son bouquet de cordes qui ouvre l’album, le titre homonyme et addictif “Small Talk” et ses influences Kate Bushienne et la dramatico-sensuelle “Champion of My Time”, on ne sait guère où donner de la tête.

Pour celles et ceux qui n’ont pas encore tout à réussi à faire leur deuil de Little Green Cars, Small Talk saura vous insuffler un brin de nostalgie tout en vous enveloppant de cette musicalité extraordinaire de ces quatre musicien·ne·s qui, avec cet album, prouvent encore une fois que la bonne pop intelligente n’est pas morte.

Small Talk – Soda Blonde (Velveteen Records)