Étrange Hiver : quand Tom McRae efface le chaos
CHEF D’ŒUVRE – Le mois dernier, Tom McRae sortait Étrange hiver, un album de duos franco-britanniques. L’album de l’année.
Tu le sais, chez Rocknfool, on aime les chansons tristes. Les belles chansons mélancoliques. Celles qui nous font pleurer. On les écoute toute l’année, mais elles touchent en général plus fort entre novembre et février, sous le poids écrasant de l’hiver. Il faut dire que les hivers, ces dernières temps, sont bien gris, à force de crises, de guerres, de nouvelles désastreuses. Mais pendant que le monde semble s’approcher chaque jour davantage du chaos, ces chansons sont nos phares dans la nuit. Et Étrange Hiver, sorti par Tom McRae il y a une poignée de semaines, vient nous donner onze nouvelles raisons d’aller vers la lumière.
Onze pour onze chansons. Onze pépites. Onze titres à la beauté égale et disons-le, cela relève de l’exception. Quel album peut se vanter d’être magnifique de bout en bout ? Celui-là. Aux premières notes de “Wild Love”, on retrouve les ambiances feutrées et un peu sombres de ce songwriter à la guitare qu’est Tom McRae. Un piano délicat et on bascule dans la lumière. Quelques secondes plus tard, la voix de Keren Ann et une nappe électronique nous inquiètent à nouveau avant de nous mener aux sommets remplis de violons. Cet album sera un album de Tom McRae. On le sent, on l’entend, tout ce qu’on aimait déjà depuis les débuts sera aussi sur ce disque.
L’ambivalence faite reine
Et pourtant pas un seul titre ne sera chanté en solo par Tom, qui s’est adjoint les services de onze artistes français pour l’accompagner dans cet étrange hiver. L’amour pour notre pays ne se dément pas pour celui qui vient autant que possible sur notre territoire et a toujours montré son intérêt pour la chanson française. Il chantera d’ailleurs plusieurs fois dans la langue de Molière, sur son duo avec Alex Beaupain qui donne son titre à l’album, sur “Sans Lumière” avec Vanille. Mais aussi sur “Gingko” avec chien noir, aux paroles qui nous font craindre les larmes. Et qui nous préparent en fait au déluge qui arrive sur le duo avec clou, “Speeding Cars”, à la pureté sans nom. L’équilibre parfait de ces deux voix…
Peut-être qu’il est là, le génie de McRae depuis toujours, qui se traduit si bien dans Étrange Hiver. L’équilibre. Entre la France et l’Angleterre. Entre les voix masculines et féminines. Entre la guitare (parfaite “Half On My Mind” avec la grande Alma Forrer) et le piano (“Lover’s Souvenirs” avec Rose). Entre l’intime (“Lost In Translation” avec Julien Brocal, si pure) et l’immense (“For My Confessor” avec Aïtone). Entre l’ombre et la lumière. Toujours en délicatesse, avec une humilité et une liberté qui étonnent encore, malgré les années. Et qu’on ne se lasse pas de retrouver sur scène. Ça tombe bien, il est en tournée en France en ce moment.
Parce qu’après l’hiver, aussi étrange soit-il, vient toujours le printemps.