Francouvertes soir 3 et 4 : variété et qualité confirmées !

LIVE REPORT – La 26e édition des Francouvertes bat son plein avec deux soirées sold out et les prestations de Rau Ze, BéLi, YUYU, Madame Autruche, Émile Bourgault et Allô Fantôme.

Malheureusement, l’actualité nous rattrape en ce début de semaine avec l’annulation de la prestation d’Ariane Roy pour cause de virus (encore et toujours…). Un peu déçu mais non moins excité par cette nouvelle semaine de spectacles très prometteurs.

Et on ouvre avec Rau Ze, BéLi et YUYU. Ça rape fort pour un lundi.

Soir 3 : Rau Ze, BéLi, YUYU

Rau Ze est notre coup de cœur de soirée. Dès les premières notes (très instrumentales), on se sent happé par l’univers éclaté du groupe au style délicieusement hybride. Entre la teneur jazzy des cuivres (le saxophone de Jeremy Leon se marrie parfaitement à l’ étonnante trompette de Violet Hébert) et la voix soul de Rose Perron, on est quelque part entre le rap, le jazz, la neo-soul, voire le skat.

Les textes de Rose, plaqués sur cet exaltant mélange de sonorités, apportent une touche de sensibilité bienvenue dans ce projet qui détonne. Il faut dire que le groupe ne manque pas de charisme et d’une énergie contagieuse. Si l’attention du public se focalise beaucoup sur le combo voix-cuivres, les performances des batteur, bassiste et claviériste restent très efficaces. Un tout mémorable qui mérite un standing ovation (une première pour cette session des Francouvertes).

Surprise, la moitié du groupe de Rau Ze remonte sur scène pour accompagner la performance de BéLi. On s’en réjouit et s’attend à un spectacle au moins aussi ardent que le précédent. Or, BéLi ne parvient pas à nous transporter vers de nouveaux cieux et la formule ne fonctionne que partiellement. Sans conteste, la ligne instrumentale reste très satisfaisante. La trompette (Violet Hébert, ici encore) dégage un son feutré délectable, la ligne de basse se démarque bien et la combinaison du tout frise avec les groove du célèbre groupe L’Impératrice qui ne manquent pas d’ambiancer le public.

Toutefois, la naïveté des paroles qui annonçaient pourtant un programme haut en couleur (la lutte contre le patriarcat) déçoit franchement. Les notes enfantines du show ne sont pas assumées jusqu’au bout et finissent par brouiller les pistes : où veut-on nous amener avec ce projet ? Le spectacle reste appréciable et la voix de BéLi révèle des mystères que l’on remarque lors d’un solo au piano, tout en douceur et suavité. 

Décidément, c’est la soirée des cuivres (et tant mieux !). Sur scène, YUYU est accompagné de nombreux.euses musicien.nes dont une saxophoniste qui offrira un solo surprenant, quoique malheureusement peu valorisé. Malgré une belle myriade de talents sur scène, nous embarquons difficilement dans l’univers musical de YUYU.

Dévoilant une voix tout à fait surprenante, délicieusement grave (que l’on pourrait assimiler à celle du belge Lomepal), le chanteur ne parvient pas à nous convaincre de sa proposition mi-rap mi-reggae et, surtout, assez flyée. Les textes ne sauvent pas la mise et on peine à entrer dans l’imaginaire de l’artiste. Peut-être, n’est-ce tout simplement pas notre style …

Soir 4 : Madame Autruche, Émile Bourgault, Allô Fantôme

Deuxième soir, les Francouvertes sont sold-out, la foule est au rendez-vous et l’ambiance, électrique. Comme chaque soir, les festivités s’ouvrent avec la session acoustique “J’aime mes ex” et, cet ex là, oh qu’on l’aime ! il s’agit bien sûr de Valence, venu seul avec sa guitare (une première nous avoue-t-il), sa voix enveloppante et sa sensibilité poétique. Une performance frissonnante de beauté. Valence sera en concert le 17 avril à la Sala Rossa.

Des chansons “dépressives mais dans la joie”. Madame Autruche (Mélissande Archambault) définit son projet comme une tentative de musicaliser le déni (intéressant). La joie, oui, on la ressent. Les notes enjoués de son violon apportent un côté dansant indéniable. On se situe à l’orée du country-folk, du rock et de la chanson québécoise. La voix de Mélissande se rapproche de celle si atypique de Daphné Brissette, voix des formations feu-Canailles et Bon Enfant. On aime ou pas. À noter, la performance de la claviériste Mélissa Fortin se démarque avec un côté déconstruit-jazzy lors d’un solo remarquable. Ça oui, on aime!

Du haut de ses dix-huit ans, Émile Bourgault a de quoi impressionner : sa maîtrise technique et son aisance sur scène sont impeccables. Pas un seul impair, le tout est liché et nous laisse deviner la personnalité exigeante et hyper-active de l’artiste en herbe. Accompagné de trois musiciens dont l’énergie est similaire au jeune chanteur, Émile Bourgault casse sa poésie sur des riffs nostalgiques de rock garage. L’écriture est partie prenante de la vie du musicien, c’est manifeste, même si la naïveté de certaines paroles nous laisse parfois perplexes. Le projet est prometteur, sans pour autant nous séduire complètement (question de goût ici). Reste à suivre…

Une scène jam-packed comme la salle. Au centre, Allô Fantôme (Samuel Gendron) et son clavier. Autour, une myriade de musicien.nes dont on reconnaît certain.es pour leur appartenance à d’autres groupes de la scène nouvelle montréalaise (Efy Hecks, Mort Rose). Le côté excentrique voire spectral (d’où le nom ?) du tout nouveau projet de Samuel Gendron ne laisse pas de marbre et on se laisse très vite convaincre par les sonorités déjantées et saturées de cette formidable cacophonie musicale. Sans conteste, la similarité du projet avec celui du chanteur-compositeur Hubert Lenoir saute aux yeux. On apprécie le côté Tim Burton en sus. Définitivement, notre coup de cœur !

Classement provisoire :
1 – Rau Ze
2 – Émile Bourgault
3 – Hôte
4 – Allô Fantôme
5 – NINAN
6 – FAÇADES
7 – pataugeoire
8 – BéLi
9 – YUYU

Texte : Elise Denis / Photos : Emma Shindo