Heureux qui comme Bernhari, a fait un beau voyage
CHRONIQUE – Une pause de plusieurs années pour se (re)trouver. Bernhari vit désormais à Paris et vient de sortir “Les Odyssées”, un nouvel EP.
Sept ans après, Bernhari est de retour. On le pensait disparu dans la brume des musiciens qui œuvrent hors radar ou parmi ceux qui changent de profession après quelques désillusions. On l’avait vu pour la dernière fois dans un sous-sol du Mile-Ex, fin 2018. Le revoilà avec un nouvel EP indé, intitulé Les Odyssées. Ah, et il est installé à Paris maintenant.
Si on tenait à vous en parler, c’est d’abord parce que le single “Motel Gédéon” nous avait bien plu. Ensuite, parce que c’est avec, et sans surprise qu’on avait appris qu’il s’agissait des prémices d’une collaboration étroite avec les gars de Feu! Chatterton (comprendre les quatre gars derrière Arthur Teboul le chanteur moustachu : soit Clément Doumic, Antoine Wilson, Sébastien Wolf et Raphaël de Pressigny).
Avec surprise, parce qu’on vous l’a dit, on le pensait disparu. Et sans surprise parce qu’on le savait proche de cette bande d’orfèvres musicaux (dont il a fait les premières parties en France). Il nous l’avait aussi avoué à demi-mots lors de notre dernière rencontre.
Retrouver l’inspiration à Paris
Sept ans, c’est long donc. Il y a eu la pandémie certes, l’acclimatation à Paris pour un Québécois en exil aussi (pas facile, on lui accorde car on SAIT). Mentionnés aussi dans la liste des raisons : prendre des distances avec soi-même, désacraliser le métier de chanteur, lâcher-prise, s’ouvrir aux autres, et “réfléchir aux mirages ensorcelants de l’inspiration”. Vaste programme. On comprend que ça ait pu prendre quelques temps.
Revenons au résultat final. Ce ne sont “que” quatre chansons oui. Mais, si on vous écrit ce petit papier, c’est bien parce qu’on les a toutes aimées ces chansons. Mieux vaut la qualité que la quantité disait un grand sage. La patte chattertonienne y est pour beaucoup, mais pas que. Le timbre de voix caractéristique de Bernhari, à mi-chemin entre un Peter Peter et un Christophe, ses textes poétiques, peu articulés, pleins de réverbération, teintés de voyages, de regrets et de limbes, y sont aussi pour beaucoup.
Fièvre et palmiers
Les chansons sont fiévreuses. D’amour inquiet pour “Les Odyssées” qui donne son nom à l’EP. Sans doute la plus accrocheuse des quatre, bien que la plus courte. La batterie catapulte le tout. On a l’impression d’être pris dans une course effrénée où la basse vient nous donner la stabilité nécessaire pour nous accrocher. On adore.
“Rien de meurt sous les étoiles” est une boîte de pandore de mélancolie. Pas seulement parce qu’il est question d’amour impossible un soir d’été en Gaspésie. Par ce petit riff de synthé, tel quelques gouttes d’eau contrariées par une batterie légère qui file, des nappes de basse pesante et des effets électro qui viennent alourdir l’ambiance. On adore encore.
On vous a déjà parlé de “Motel Gédéon”. La plus fournie en texte, la plus longue aussi. Celle qui parle de la fin d’une jolie histoire d’amour outre-Atlantique, entre Berlin, Paris et Montréal. “Les palmiers bleus” suit. Une sorte d’ovni sur l’EP. Car dès les premières secondes on pense à Alain Souchon, dans cette façon de susurrer les mots. D’ailleurs, c’est sans aucun doute la chanson la plus “up la vie” de l’EP. Une ambiance insulaire, soleil qui miroite dans les vagues et cocktail à l’ananas, qui part à la fin en solo instrumental Grateful Dead-ish. Le kiff.
Pour résumer, du bon stock fait sans prétention qu’on a plaisir à entendre et ré-entendre. De la musique pour le plaisir de faire de la musique entre amis, entre musiciens. Des chansons qui n’ont pas pour vocation de devenir des hymnes sur les réseaux sociaux, mais bien de simplement toucher celles et ceux qui voudront bien tendre une oreille curieuse et se laisser emporter.
Crédit photo : Amanda Evertsson
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