Le one man show de Ben Mazué

LIVE REPORT – Désolée pour le retard, mais comme la tournée n’est pas terminée, Ben ne nous en voudra pas de dire, seulement aujourd’hui, tout le bien que l’on a pensé de son concert. Il y a quinze jours en effet, il offrait aux Lyonnais deux soirées intimes au Radiant de Caluire. Nous y étions, après plus d’un an d’attente !

La première fois avec Ben Mazué sur scène (formule à ne pas sortir de son contexte !), c’était il y a probablement dix ans, vingt-cinq personnes maximum, dans une toute petite salle parisienne. On était à des années lumières du succès qui l’attendait et ferait de lui un artiste Virgin Radio ! En quelques minutes de ce “quasi tête à tête” intimiste, nous étions en larmes, bouleversées, renversées, surprises et prises de court par l’émotion. Car à cette époque il y avait un peu de mélodies, et surtout beaucoup de textes, de slams, de mots. Des mots sublimes, d’une précision d’amoureux perfectionniste de la langue française, et déjà cette impudeur dans le partage de ces petites choses du quotidien qui font pourtant toute l’essence de la vie.

Le revoir sur scène, après cette première expérience si chamboulante, et qui nous avait surtout liés à tout jamais, était un rendez-vous plus qu’attendu. Inutile de le préciser. Est-ce que la magie opérerait à nouveau ? Sous-entendu, est-ce que les larmes de bonheur/émotion/trouble couleraient à nouveau ? Oui, c’est parfois aux quantités de larmes que l’on peut estimer la qualité d’un artiste. En tout cas chez Rocknfool, nous revendiquons ce baromètre !

Une scénographie intime et cosy

La mise en scène de cette tournée a été subtilement travaillée. Tant au niveau du décor, certes minimaliste mais qui met en valeur qui il faut, au moment où il faut. Ensuite, la chorégraphie, le rythme du spectacle et surtout la partie stand-up sont finement orchestrés, tout en laissant la part belle à l’improvisation inspirée par le public du jour. Qui dit improvisation ne dit pas “j’arrive sans avoir travailler mon sujet”. La préparation se sent, et le public voit immédiatement que Ben ne s’adresse pas exactement de la même façon aux spectateurs de la veille. Donc, l’ensemble crée très rapidement une atmosphère de convivialité, et surtout d’intimité.

L’intimité, quasi l’impudeur, c’est de ça dont il est question dans cet album Paradis. Il est donc rassurant de voir que c’est aussi ce que l’on retrouve en live. Seul petit bémol, certains titres semblent avoir perdu le ton et le rythme de l’album, et on le regrette. Comme “Pas très original” ou encore “Nulle part” qui sont pourtant nos préférés. La magie n’opère pas de la même façon que sur l’album, trop rapide, trop pressé de s’en débarrasser, Ben est peut-être lassé de ces deux-là, qui sait ?  

Des guests plus réussis que des hologrammes

En revanche, on apprécie de retrouver “Semaine A/Semaine B” quasi en l’état, grâce à la présence d’Anaïde Rozam projetée sur l’écran derrière Ben. Le duo est intact et il fait mouche, on sourit, on partage avec eux la lecture de ce journal intime. Idem pour le tubesque “J’attends”, bien que nous soyons à Lyon, Pomme n’est pas là. Mais sa silhouette en ombre chinoise et sa voix cristalline viennent faire chalouper le public.

Quel bonheur en revanche que les duos s’arrêtent là et que l’on puisse avoir Ben seul pour interpréter “Gaffe aux autres” ! Nous n’avions jamais compris l’ajout assez inutile, voire agaçant, de la voix nasillarde de Jérémy Frérot sur ce titre. En live, dépouillée et sublimée par Ben seul, cette chanson confirme qu’il est bien ce gars qui fait gaffe aux autres, à nous en tout cas c’est sûr ce soir-là.

Ben nous fait parcourir ses titres tel un itinéraire, avec ces différentes étapes, un début, un milieu et une fin. Dans le rôle du compteur d’histoire il excelle et a notre attention captive jusqu’au bout. On regrette que ce temps nous paraisse trop court, où était-il vraiment trop court ? Il manque quelques titres que l’on aurait aimé entendre.

On rit beaucoup, d’où la référence au one man show. Ben maitrise les mots et donc, forcément, il sait en jouer pour notre plus grand plaisir et amusement. On peut répondre à la question, oui, la magie opère à nouveau, même si on ne peut que regretter des conditions de concerts quelque peu chamboulée par la crise sanitaire et la notoriété croissante de l’artiste. Égoïstement, on aimerait qu’il demeure éternellement ce doux garçon roux, un peu timide qui nous avait donné la sensation de ne parler qu’à nous…

En concert le 8 avril au Zénith de Paris et le 13 à l’Amphithéâtre de Lyon.

Crédit photo : Morgane Milesi / Décibulles 2021


Petit aparté : il reste la question de savoir si ces concerts dans l’ère post covid sont adaptés aux attentes des fans de musique live ? À l’attention du Radiant : les contraintes sanitaires vous ont visiblement rendus fous. Un concert qui commence supposément à 20h30, pour lequel les places assises, numérotées, achetées depuis quasi un an, ne peut pas contraindre ses spectateurs à se comporter comme s’ils étaient à l’opéra.

Sachez chers Lyonnais, que si vous arrivez à 20h45, pas de première partie donc un concert qui débute (depuis quand un concert débute à l’heure et sans première partie ?!). Des hôtesses pour vous empêcher de rentrer dans la salle sans un accompagnement en mode furtif silencieux à plat ventre tels des G.I. (C’est vrai que les chanteurs de pop rock n’ont pas l’habitude de chanter face à un public de festival ivre mort qui hurle “à poil !”).

Il faut donc entrer en silence, sans déranger, qui sait si dans ces conditions, vous aurez le droit de ressortir pour aller aux toilettes par la suite ?! Et vous êtes relégués au tout dernier rang de la salle, car attention “c’est écrit sur vos billets”, vous perdez vos places, bien choisies pour être tout devant il y a des mois. Et oui, à partir de 20h15 les autres spectateurs se les sont vues offrir en votre absence. Pour 15 minutes de retard. À un concert de pop rock. Où vous n’avez pas le droit d’amener une bière ou de la nourriture. Finalement, les concerts au Radiant maintenant, ce sont bien des One Men Shows, avec leurs codes aussi, donc sachez-le… Triste époque dans laquelle on se demande à quoi ressemblera un vrai concert de rock… ça sera sans nous…